Mardi 19 mars 2024
Le cabinet de curiosités par François Lafon
vendredi 29 octobre 2010 à 09h10

« En un lugar de la Mancha… » On ne saura jamais à quel endroit songeait Miguel de Cervantès en écrivant les premières lignes du Don Quichotte, mais son roman a désormais une adresse dans l’univers virtuel : un site fascinant, mis en ligne par  la Bibliothèque Nationale d’Espagne. On peut y feuilleter l’édition originale (ou, pour ceux qui ne sont pas familiers avec l’orthographe du XVIIè siècle, la transcription en espagnol moderne) des aventures du Chevalier de la Triste Figure et de son écuyer Sancho Pança. Le chargement complet du site est un peu lent et pour cause : ce n’est pas uniquement le texte qui est mis à la disposition de l’internaute mais toutes sortes d’enrichissements  propres à satisfaire le lecteur le plus curieux. Un commentaire musical censé nous plonger dans l’atmosphère cervantine se déclenche sitôt qu’on arrive sur le site, mais cette bande son est bientôt énervante, un peu comme la touche « couleur locale » des grandes productions hollywoodiennes. Coupez donc le son, mais ne négligez pas pour autant la section consacrée à la musique. On peut y écouter des  extraits de « la Musique dans le Quichotte », un CD de l’ensemble Orphénica Lyra dirigé par José Miguel Moreno, publié chez Glossa, label qui a justement  pour spécialité la musique espagnole de la Renaissance et du baroque. Quant à la vraie musique du Quichotte, pas besoin d’un CD pour l’entendre : il suffit de se laisser porter par la langue de Cervantès.

Pablo Galonce

«  Cela ne ressemble pas à l’alcool, ce n’est pas doré comme l’alcool, et pourtant, c’est de l’alcool ». Retournez le slogan de Canada Dry, et vous rendrez bankable les artistes classiques. C’est tout au moins ce que croient les éditeurs. Que le baryton Thomas Quasthoff chante le blues dans son  récital Tell it like it is, ce n’est pas un scoop : son Jazz Album a déjà fait un tabac il y a trois ans. Comme Renée Fleming (Sophisticated Ladies, aux côtés de Norah Jones et Diana Krall) et Anne Sophie von Otter (Love Songs  avec Brad Mehldau), il s’emploie à rendre sa voix méconnaissable, et y parvient assez bien. L’exercice est, si l’on ose dire, un classique : Eileen Farrell et Kiri Te Kanawa s’y sont essayées avant eux. 

On n’est pas non plus surpris d’entendre Nigel Kennedy jouer les Stéphane Grappelli de l’ère électro avec son Quintette (sax, piano, basse, vocal, percussions) augmenté de la voix de Boy George dans Shhh !, une musique mi-pop mi-rock écrite par lui-même et pour lui-même. Fiction, par le Quatuor Ebène, est plus symptomatique de la tendance. D’abord, le disque est né en France,  où le cross over n’est pas dans les mœurs. Ensuite, ce n’est pas un clin d’œil adressé à leur cher public par des artistes qui n’ont plus rien à prouver, puisque les Ebène, qui fêtent à cette occasion leur dixième anniversaire, n’en sont qu’à leur troisième CD chez Virgin.

Enfin l’on peut se demander si les standards et thèmes de films qu’ils ont choisis font bon ménage avec l’image a priori peu souriante du quatuor à cordes. Qu’ils réalisent là « le rêve d’un quatuor jouant et improvisant pour retrouver cette liberté propre à tous les musiciens classiques du passé », on n’en doute pas. Que les guest stars Luz Casal (Amado mio du film Gilda), Fanny Ardant (Lilac Wine, connu par Nina Simone) et Natalie Dessay (Over the rainbow, soixante-dix-ans après Judy Garland) contribuent au succès (international ?) du produit, on l’espère. L’avantage, pour ces pros venus d’ailleurs, c’est qu’on ne leur demande pas plus d’égaler les spécialistes du genre qu’on n’exige des artistes participant au Gala de l’Union de rivaliser avec les rois du cirque.

François Lafon

Shhh ! Nigel Kennedy Quintet -1 CD EMI 6 08502 2

Tell it like it is. Thomas Quastoff and musicians - Deutsche Grammophon 477 8614

Fiction. Quatuor Ebène and friends - Virgin Classics 5099962866804

C’est tellement tendance que c’est désormais indispensable : chaque maison d’opéra, chaque orchestre veut proposer sa propre application pour iPhone, le téléphone-appareil-photo-agenda-électronique-console-de-jeux, n° 1 d’Apple. L’enjeu pour des institutions comme l’Opéra de Los Angeles, l’English National Opera ou l’Opéra du Rhin, c’est de toucher un public urbain, a priori jeune et branché. Dernier arrivé, l’Opéra de Paris vient de présenter son application iPhone (elle fonctionne aussi sur l’iPad, la tablette numérique d’Apple) : calendrier, guide pratique, spectacles à l’affiche, rien d’essentiel n’y manque, le tout présenté avec élégance et sens pratique. Le petit plus, ce sont les vidéos des spectacles à l’affiche : qui aurait crû avoir un jour l’Opéra-Bastille dans sa poche ?

Pablo Galonce

dimanche 24 octobre 2010 à 10h51

« Bien que la musique soit halal, la promouvoir et l’enseigner est  incompatible avec les valeurs sacrées de la République islamique. Il vaut mieux que notre belle jeunesse s’occupe à étudier les sciences et à pratiquer des activités saines, comme le sport », a  répondu l’ayatollah Ali Khamenei, Guide suprême de l’Iran, à un jeune homme qui s’inquiétait de savoir s’il  était ou non convenable de céder aux charmes d’Euterpe. On savait que Khamenei, dont les moindres déclarations sont considérées comme paroles d’Evangile (si l’on ose dire) par les autorités politiques et religieuses iraniennes, n’était pas un mélomane convaincu. Cité par le quotidien anglais The Guardian, Houshang Asadi, un de ses compagnons de cellule avant la révolution de 1979, rappelle que celui-ci n’a jamais toléré que les hymnes  patriotiques et les chants religieux. Une fois au pouvoir, il n’a eu de cesse de chasser les musiciens, qu’ils soient classiques ou de variétés. Pour preuve que les pouvoirs incontrôlables de la musique sont  considérés comme hautement symboliques par les  politiques iraniens, le réformiste Mohammad Khatami en a ouvertement favorisé le développement, alors que son successeur  Mahmoud Ahmadinejad  l’a remise à l’index, craignant par ailleurs que les concerts ne soient prétextes à des manifestations antigouvernementales, spontanées ou orchestrées par l’opposition. L’expérience malheureuse de la tournée de l’Orchestre Symphonique de Théhéran, venu jouer, en janvier dernier dans plusieurs villes d’Europe de l’ouest (dont Strasbourg) une Symphonie de la Paix et de l’Amitié aux  ambitions plus propagandistes que musicales, n’a pas dû contribuer à améliorer la situation. 

François Lafon

jeudi 21 octobre 2010 à 07h31

Le Panthéon, le Mac-Mahon, le Balzac à Paris, quelques rares salles à travers la France : le contraire des multiplex, les villages gaulois des cinéphiles. Le Balzac est presque sur les Champs-Elysées. Tout est dans ce presque. Dans les années 1960, la salle ronde affichait Le Gendarme de Saint-Tropez aussi bien que Les Histoires extraordinaires de l’improbable trio Fellini-Malle-Vadim. Les moeurs cinématographiques évoluant, on a vu un public différent faire la queue sur la pente raide de la rue Balzac. Aujourd’hui, pour vivre au lieu de survivre, son directeur Jean-Jacques Schpoliansky joue la carte multifonction, avec une tendance marquée pour la musique. Affluence pour Carmen en direct du Liceo de Barcelone, avec Roberto Alagna ; délocalisation à l’église St Pierre de Chaillot pour la Jeanne d’Arc de Dreyer accompagnée en direct à l’orgue ; idem en version profane le 21 novembre avec Steamboat Bill Junior de Buster Keaton, illustré par un pianiste dans la salle ; même principe du 23 novembre au 8 février, Jean-François Zygel improvisant sur quatre films de Murnau : L’Aurore, Faust, Le dernier des hommes et Faust. Le 30 novembre, Tosca en  différé du Carlo Felice de Gênes, avec le couple Daniela Dessi - Fabio Armiliato. Il y a aussi, le samedi soir depuis bientôt dix ans, du jazz et des concerts de musique de chambre.  Voilà trente-six ans que Schpoliansky tient à bout de bras la salle (il y en a trois depuis les années 80) ouverte par son grand-père en 1935. Le cinéma - art de la nostalgie -, comme bastion d’un art de vivre, entre ciné-club et maison de la culture : bien vu !

François Lafon

Photo :  © Luc Pâris

mardi 19 octobre 2010 à 18h37

Philharmonie de Paris ou Maison de l’histoire de France ? Frédéric Mitterrand penche pour la première, Nicolas Sarkozy pour la seconde. L’enthousiasme présidentiel pour la salle de la Villette n’a pas résisté à la politique du rabot à finances : tant qu’à faire des efforts, autant que ce soit pour un projet électoralement utile. En attendant, porte de Pantin, le chantier prend l’eau et les équipes de l’architecte Jean Nouvel se tournent les pouces. « Je souhaite profondément que l’on puisse construire cette Philharmonie, » a martelé le ministre en présentant le budget de la Culture pour 2011. Comme l’état traîne les pieds, un emprunt est envisagé. Ouverture retardée à 2013, si elle a jamais lieu. Pour comble de malchance, les salles parisiennes ont du mal à faire le plein, en cette rentrée « sociale ». Alors pourquoi en ajouter une ? Argument pro-Philharmonie : la Cité de la musique a toujours autant de succès. Mais comme l’expliquait Nathalie Sarraute : quand une phrase tient debout, il est risqué de chercher à l’étoffer, même s’il faut pour cela renoncer à une belle idée.

François Lafon

Photo : maquette de la future (?) Philharmonie de Paris

jeudi 14 octobre 2010 à 10h54

Au moment où le Français Dominique Meyer prend la direction de l’Opéra de Vienne, Actes Sud sort un petit livre d’André Tubeuf sur ledit Opéra. Tubeuf, bien connu des amateurs, a un style bien à lui, à la fois parlé et complexe, avec un don pour la formule évocatrice, la surenchère hypnotique, le raccourci qui en dit long. Quiconque ne connait pas le sujet sur le bout des doigts se perd dans ces énumérations de chanteurs, de chefs, d’œuvres et de rôles,  et pourtant, comme le dit Meyer dans sa préface, « il vous communique une envie irrésistible d’aller fouiller les bacs des disquaires, afin de parcourir, en sa compagnie, le chemin initiatique de ses propres découvertes ». Ce n’est pas une étude critique que Tubeuf propose de l’Opéra de Vienne, mais une légende dorée. Vienne est la ville la plus réactionnaire du monde ? Oui, et alors ? Mahler, en 1900, Lorin Maazel, quatre-vingts ans plus tard, y ont fait les frais de l’antisémitisme local ? Ce n’est pas le propos. Rêvons ensemble à un opéra idéal, où une troupe faite de stars entretient une tradition, laquelle témoigne de toute une civilisation. Les yeux de l’amour, en somme. C’est bien de ce point de vue que tout un public conçoit encore l’opéra.

François Lafon

André Tubeuf : L’Opéra de Vienne. Actes Sud, 28 euros.

mardi 12 octobre 2010 à 08h42

Sur les coffrets Decca dont elle était la vedette, Joan Sutherland affichait un sourire qui humanisait son visage étrange et immense, aussi étrange et immense que la voix qui avait fait sa gloire. Mais dans l’opéra romantique italien, il y avait toujours le souvenir de Callas, voire la présence de sa contemporaine Caballé pour lui faire de l’ombre. Dans les années 1980, quand on a réédité les coffrets Decca, son visage et son sourire ont été exilés au dos de la pochette, et Luciano Pavarotti, le ténor qu’elle avait révélé et dont elle avait fait son partenaire attitré, s’est retrouvé en couverture. Les critiques - en France tout au moins, parce que dans les pays anglo-saxons elle était intouchable - n’étaient pas tendres avec elle : grande voix, oui, et agile au-delà de l’entendement, mais diction molle et indifférence vis-à-vis de personnages qu’elle interprétait. On la savait aussi dominée – artistiquement et intellectuellement – par son mentor et mari, le chef d’orchestre Richard Bonynge. Bref, Joan Sutherland ne faisait pas rêver. Il lui manquait la fragilité, pour ne pas dire le malheur. Elle ne faisait même pas de caprices de diva. Elle vient de mourir, à quatre-vingt-trois ans, en Suisse, son pays d’adoption, « parce que mon Australie natale, disait-elle, est trop éloignée des grands centres lyriques ». On l’appelait La Stupenda (la Stupéfiante). Réécoutons-la, dans ce répertoire (Rossini, Bellini, Donizetti) où la musique a pour seule tâche de servir la voix. Ce n’est pas tous les jours que l’opéra nous plonge dans la stupéfaction.

François Lafon

lundi 11 octobre 2010 à 16h43

Drôles de chaises musicales à l’Opéra de Nice. Il y a deux ans, la mairie décide de donner une nouvelle chance à la maison, qui ronronnait depuis trop longtemps. Elle engage pour cela Jacques Hédouin, ex-directeur administratif du Châtelet, et, en qualité de conseiller artistique, le niçois Alain Lanceron, déjà directeur de EMI France et de Virgin Classics. L’effet escompté ne se fait pas attendre et Nice affiche des stars EMI-Virgin (mais pas seulement) nommées Natalie Dessay, June Anderson, Roberto Alagna, Marie-Nicole Lemieux, Philippe Jaroussky, Robert Carsen, Guennadi Rojdestvenski ou Michel Plasson. Or voilà que Lanceron, qui ne s’était prudemment engagé que pour un an, apprend par la presse que son contrat n’est pas renouvelé. Résultat, les stars annulent à tour de rôle leur participation aux productions futures. Parallèlement, l’Orchestre Philharmonique de Nice s’est donné pour chef un autre enfant du pays, Philippe Auguin, lequel se sent apparemment les épaules d’un directeur artistique de l’Opéra. La toute récente nomination d’Auguin comme directeur de l’Opéra de Washington a-t-elle pesé dans la balance ? En attendant, le téléphone de la mairie sonne dans le vide et Lanceron attend toujours des explications.

François Lafon
 

Mini-tempête sur le Walhalla à propos de la participation d’un orchestre israélien au prochain festival de Bayreuth. Katharina Wagner, arrière-petite fille de Richard et co-directrice du festival avec sa demi-sœur Eva, rêvait de faire venir le Philharmonique d’Israël, mais c’est le plus modeste Orchestre de Chambre d’Israël, dirigé par son ami Roberto Paternostro, qui a répondu à l’invitation. Explication d’Erella Talmi, présidente de l’orchestre : "Il n'est pas convenable de jouer Wagner ici (en Israël) tant qu'il y aura parmi nous des gens réfractaires à sa musique, mais on peut en revanche faire entendre ses oeuvres à l'étranger". Entre temps, le quotidien israélien Haaretz a mis le feu aux poudres, en affirmant que le festival avait annulé le projet. « Le concert aura bien lieu, » rétorquent les organisateurs, tout en précisant qu’il serait donné parallèlement au festival, sous l’égide de la ville de Bayreuth, et qu’il ne comprendrait qu’une seule œuvre de Wagner (Siegfried Idyll), pièce que les musiciens ne répéteraient qu’une fois arrivés sur le sol allemand. En attendant, Katharina Wagner, qui est aussi metteur en scène, a affirmé sur le site israélien ynetnews.com qu’elle aimerait beaucoup monter un opéra de son arrière-grand-père en Israël et qu’elle attendait qu’on l’invite. Elle avait prévu - officiellement pour inviter l’Orchestre - un voyage à Tel Aviv, qui a été annulé « dans l’hilarité générale », précise le site operachic.com. Une allusion à sa mise en scène déjantée des Maîtres-chanteurs de Nuremberg, il y a trois ans au festival 

François Lafon

vendredi 8 octobre 2010 à 09h27

Andrew Woolley, un musicologue attaché à l’université de Southampton, vient de découvrir une copie manuscrite d’un concerto pour flûte de Vivaldi dans les papiers de la famille Lothian, déposés en 1991 aux Archives Nationales d’Ecosse. C’est probablement Robert Kerr, fils du troisième marquis de Lothian et flûtiste aguerri, qui l’a acquise dans les années 1730, durant le tour d’Europe que les fils de famille se devaient d’effectuer à l’époque. Il devait exister d’autres copies dudit concerto, puisqu’on en trouve trace dans le catalogue d’un libraire hollandais en 1759, treize ans après la mort de Kerr. L’œuvre, qui sera créée à Perth (Ecosse) en janvier prochain et dont l’exécution dure de six à sept minutes, faisait partie d’un groupe de quatre concertos disparus qui, telles Les Quatre Saisons, auraient pu s’appeler Les Quatre Nations, à avoir la France, l’Espagne, l’Angleterre et les Indes. Car celui-ci est sous-titré Il Gran Mogol. Curieuse coïncidence : Le Grand Mogol est aussi le nom du cinquième plus gros diamant jamais connu, une fabuleuse pierre de 280 carats dédiée à Shâh Jahân, bâtisseur du Taj Mahal, découverte en 1650 dans la mine de Kollur, à Golconde, et disparue en 1739 lors du pillage de Dehli par les Perses. Mais pour être digne d’un tel joyau, il aurait au moins fallu que ce concerto soit composé par Mozart.

François Lafon

mardi 5 octobre 2010 à 11h36

En consultant la liste détaillée, publiée par Knud Martner (Mahler’s concerts – Kaplan Foundation), des quelque trois-cents concerts dirigés par Mahler tout au long de sa carrière, l’infatigable Alex Ross, critique musical au New Yorker, a découvert que la dernière pièce du dernier concert donné par le maestro, le 21 février 1911 à la tête du New York Philharmonic, était les pimpants Intermezzi Goldoniani, du compositeur Marco Enrico Bossi (1861 – 1925). Et Ross, sur son blog The Rest is noise, d’imaginer la déception des fans de Mahler, qui l’auraient mieux vu tirer sa révérence aux accents de la Mort d’Isolde. Furtwängler, lui, a posé la baguette sur sa propre 2ème Symphonie (Berlin, 20 septembre 1954), et Toscanini sur l’Ouverture des Maîtres chanteurs, de Wagner (New York, 4 avril 1954). En 1905, Toscanini avait écrit au violoniste Enrico Polo : « Non, cher Enrico, crois-moi, ce Mahler n’est pas un artiste sérieux ».
 

 

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