Selon le tabloïd anglais Sunday Mirror, le violon sur lequel Wallace Hartley a joué "Plus près de Toi mon Dieu" pendant que le Titanic coulait a été retrouvé. Il sera mis aux enchères en 2012, à l’occasion du centenaire du naufrage, et pourrait être vendu un million de dollars. Comment a-t-on retrouvé le violon, où a-t-il passé tout ce temps ? Mystère ! Le musicien, à l’époque, aurait été sorti de l’eau serrant l’instrument dans ses bras, mais c’est les mains vides que son corps aurait été rapporté à sa fiancée. Une boite à violon, frappée aux initiales WHH, constituerait une pièce à conviction. Tout cela est distillé par le biographe people Steve Turner (auteur, entre autres, d’un livre sur Cliff Richards), qui vient de sortir The Band that played on, une vie romancée des huit musiciens constituant l’orchestre du Titanic. Une fois l’authenticité établie, une lucrative tournée de concerts n’est pas exclue. Céline Dion chantant My Heart will go on, Leonardo DiCaprio et Kate Winslet cheek to cheek sur fond d’océan, un violon sorti de l’eau mais encore en état de marche : il suffit d’y croire.
François Lafon
Play back or not play back ? Rien de très musical dans la carrière de Liz Taylor, si ce n’est, en 1977, une adaptation au cinéma d’A Little Night Music, le musical de Stephen Sondheim d’après le film d’Ingmar Bergman Sourires d’une nuit d’été. Le film, réalisé par le producer de Broadway Harold Prince, n’a pas marqué les mémoires, mais les fans de la star se chamaillent encore : est-ce vraiment elle que l’on entend susurrer le tube Send in the clowns d’une voix pas très assurée ? Réponse officielle : oui. You Tube aidant, jouez au jeu cruel des comparaisons. Evitez Catherine Zeta Jones (l’année dernière à Broadway), et délectez-vous du génie d’interprète de Judi Dench (Londres, 1998). Pour consoler les fans de Liz : Judi Dench a elle aussi joué Cléopâtre, avec Anthony Hopkins en Marc-Antoine, mais au théâtre, dans la pièce de Shakespeare. On en a moins parlé que du film de Mankiewicz.
François Lafon
Paris à la pointe de la culture ? Le 104 n’en finit pas de se chercher, la Cité de la mode est désespérément vide, le Louxor n’arrive pas à redevenir un cinéma, La Gaîté Lyrique-nouvelles-technologies essuie les plâtres, le projet de Maison de l’Histoire de France suscite un tollé. Et la Philharmonie dans tout ça ? Il y a un mois, la presse entonnait le péan : nouveau départ pour le chantier laissé en plan au bord du périphérique. Bouygues est sur l’affaire et Jean Nouvel piaffe. Ouverture prévue en 2014, et non plus en 2012. Coût estimé de l’opération : 350 millions d’euros. On est loin des 110 millions prévus en 2002. Que ne ferait-on pas pour offrir à la musique un palais digne d’elle ! Les mélomanes respirent. Et à ceux qui s’obstinent à demander pourquoi on construit cette merveille si loin du centre (lire : des beaux quartiers), on n’ose expliquer que ce n’est pas tant la musique - surtout la grande - qui intéresse nos édiles, que le symbole. La Philharmonie sera une des portes du Grand Paris. Quel Grand Paris ? On verra plus tard. En attendant, quoi de plus rassembleur qu’un palais de la musique ? Et si vous trouvez qu'un bastion – même relooké – de la culture bourgeoise est un symbole un peu orienté, libre à vous de l’interpréter comme vous le voudrez.
François Lafon
Photo : Philharmonie de Paris
Cela commence avec les Derviches tourneurs, cela continue avec un portrait de Fauré, suivi d’un portrait de Schumann, d’un concert de Michael Gielen avec l’Orchestre de Baden-Baden dans un programme Mahler-Schoenberg, de deux Nuits du violon (de Bach à Ton Tha Tiet), d’Events/Existing avec quatuors, clowns, vidéo et arts plastiques, et même d’un voyage surprise dans des lieux et avec des artistes chaque année plus surprenants. Le tout en quatre week-ends suivis par un public rien moins que bourgeois, et à des tarifs plus qu’abordables. Les artistes : le violoniste Tedi Papavrami, le pianiste Philippe Bianconi, l’Ensemble Doulce Mémoire ou l’organiste Olivier Vernet. De quoi s’agit-il ? D’un nouveau concept signé René Martin ? D’une version française du Festival de la Ruhr ? Où cela se passe-t-il ? Dans un ancien bassin minier ? Au pied des volcans du Massif central ? Pas du tout. Cela se passe à Monte-Carlo, et c’est la nouvelle édition du Printemps des Arts, dirigé pour la dixième année consécutive par le compositeur Marc Monnet. En toute élégance, celui-ci ne met pas ses propres œuvres en avant (si ce n’est, cette année, avec les Ballets de Monte-Carlo), mais n’hésite pas à aller aussi loin qu’il est possible dans la prospective. « Mon interlocutrice principale est la princesse de Hanovre, précise-t-il, qui ne m’a jamais censuré, et m’incite plutôt à aller plus loin ». La classe, en somme.
François Lafon
Printemps des Arts de Monte Carlo, 4 week-ends du 18 mars au 10 avril. www.printempsdesarts.com
« Le piano de Chopin : 80 ans d’imposture à Majorque » titre Le Nouvel Observateur du 9 mars. Et Raphaël de Gubernatis, habituellement critique de danse, d’expliquer que depuis les années 1930, les touristes visitant la Chartreuse de Valldemosa ont été invités à se recueillir devant un instrument qui n’était pas, comme annoncé, le « pauvre piano majorquin » évoqué par George Sand et sur lequel le maître a travaillé à ses Préludes en 1838 et 1839, mais une vulgaire copie construite au moins dix ans plus tard, alors que l’authentique pianino Pleyel commandé à Paris par le compositeur trônait dans une cellule voisine, ouverte plus tard au public et négligée par le guide officiel parce qu’elle n’appartenait pas aux tout puissants tenanciers du musée. Des 2 125 000 euros générés chaque année par les 250 000 billets d’entrée vendus 8,50 euros pièce, les propriétaires du musée touchent 23,75% alors que ceux de la cellule 4 (la vraie !) empochent 11%. La décision de justice interdisant d’exposer le « pauvre piano » et même de prétendre que la cellule qui l’abritait a été habitée par Chopin va-t-elle changer la donne ? En attendant, la presse locale publie avec délices des photos de Franco et de la reine Sophie en extase devant la fausse relique.
François Lafon
Recensés par le critique anglais Norman Lebrecht sur son site Slipped Disc : les concerts à Tokyo au soir du tremblement de terre. Le Japan Philharmonic Symphony a joué Stravinsky et Prokofiev au Suntory Hall sous la direction du chef russe Alexandre Lazarev. Le New Japan Philharmonic, dirigé par le chef anglais Daniel Harding, a donné la 5ème Symphonie de Mahler au Sumida Triphony Hall devant cinquante spectateurs (sur mille huit cents attendus), parmi lesquels un mélomane de soixante-neuf ans qui a marché quatre heures pour y arriver. Les musiciens ont dû dormir sur place, par terre, pendant que le chef mettait deux heures à parcourir en voiture les cinq kilomètres qui le séparaient de son hôtel. Un second concert, avec le même programme, est maintenu ce soir. Enfin la troupe du Mai Musical Florentin (trois cents personnes), avec le chef Zubin Mehta et le metteur en scène Nicolas Joel, joue à Yokohama et Tokyo du 13 au 21 mars. Sur le site du Mai Musical, la surintendante Francesca Colombo déclare : "A ce jour, nous sommes la plus grande communauté italienne au Japon, investie par le président Giorgio Napolitano du rôle d'ambassadeurs de la culture italienne dans le monde pour célébrer le 150e anniversaire de l'unification. Nous sommes persuadés que la musique peut continuer. C'est précisément pour cette raison que je ressens le besoin de rejoindre dès que possible la communauté des théâtres à Tokyo." Au programme : Tosca et … La Force du destin.
François Lafon
Scott Ross, Anner Bylsma, Kenneth Gilbert, René Jacobs, Pierre-Yves Artaud, Yvonne Loriod : les années 1980, une époque (a posteriori ?) bénie, où la musique était encore agitée de batailles idéologiques, où elle était vivante en somme. De 1987 à 1991, la Sept, relayée plus tard par Arte, avait commandé à Olivier Bernager et François Manceaux une douzaine de Leçons de musique données par ces pionniers du baroque et ces combattants de l’avant-garde. Des interprètes plus traditionnels mais non moins représentatifs de leur temps complétaient la série : Yuri Bashmet, Marek Janowski, Nikita Magaloff, Hermann Baumann, Gérard Poulet, José Van Dam. Devenus des moments d’histoire, ces documents sont rediffusés sur Arte, paraissent en DVD et sont consultables sur le site okarinamusique.com. Neuf réalisateurs s’y étaient collés, avec pour résultat commun d’offrir des gros plans sur les rapports maîtres-élèves plutôt que d’élever des monuments à la gloire des têtes d’affiches. Il y a des moments extraordinaires, comme celui où Scott Ross, bonnet sur la tête, déjà atteint par la maladie, lâche dans un sourire : « C’est que je suis génial », ou comme celui où Roger Muraro rappelle à Yvonne Loriod comment il avait été recalé au Conservatoire. La façon de filmer, la texture des images achèvent de nous replonger dans un temps perdu et pourtant très proche : outre Muraro, les élèves s’appellent Nicholas Angelich, Renaud Capuçon, Nicolau de Figueiredo, Olivier Baumont ou Emmanuel Pahud.
François Lafon
Les Leçons particulières de musique. 12 DVD Harmonia Mundi - Diffusion sur Arte tous les dimanches à 10h45, du 13 février au 15 mai - okarinamusique.com
Racisme ordinaire à Vienne. Le 10 février à 21h30, sur la Kärtnerstrasse, une jeune et élégante afro-américaine monte dans un taxi. « Pas de noirs dans ma voiture ! », déclare le chauffeur. La dame fond en larmes. L’affaire fait du bruit car celle-ci s’appelle Angel Blue, elle est soprano, et s’apprête à chanter Le Viol de Lucrèce de Benjamin Britten au Théâtre An der Wien, aux côtés d’Angelica Kirchschlager et Kim Begley. A la police, elle déclare que le chauffeur était un quinquagénaire aux cheveux gris et qu’il parlait correctement l’anglais. Réaction d’Andreas Curda, directeur de la Ligue des chauffeurs de taxi viennois : « Sans numéro d’immatriculation, on ne le retrouvera pas ». Placido Domingo, qui veille sur sa jeune carrière, présente miss Blue comme la Leontyne Price de demain. Lors des débuts de Leontyne Price en Tosca sur NBC TV, plusieurs chaînes américaines avaient refusé de relayer le programme, rien que parce qu'elle était noire. Mais c’était en 1955.
François Lafon
Photo : www.angeljoyblue.com