Mardi 19 mars 2024
Le cabinet de curiosités par François Lafon
mercredi 29 septembre 2010 à 10h06

Maria Callas, en live, à Londres. C’est ce que nous promet le Novello Theatre, dans le West End, à partir du 30 septembre. La pièce s’appelle Onassis, et met en scène l’armateur aux grosses lunettes sous les traits de Robert Lindsay, un acteur très populaire outre-Manche. Martin Sherman, l’auteur, est connu pour affectionner les sujets porteurs : sa pièce Bent, traitant de la déportation des homosexuels pendant la guerre, reste son plus grand succès. Il est aussi, à égalité avec Terence McNally (Masterclass), un spécialiste de Maria Callas : c’est à lui que Franco Zeffirelli a fait appel pour écrire le scénario de son film Callas forever, avec Fanny Ardant dans le rôle principal. Une première version de la pièce de Sherman, intitulée Aristo, a remporté un succès mitigé il y a deux ans à Chichester. L’intrigue, tirée d’un livre de Peter Evans au titre alléchant de Nemesis, the true story, met en valeur les rapports entre l’argent (Onassis) et le pouvoir (les Kennedy), Callas, dans tout ça, symbolisant la culture, la vraie, celle qui n’a pas de prix mais que le milliardaire s’est tout de même offerte. Anna Francolini, l’interprète du rôle, est considérée comme une « nature » dans les milieux anglais du théâtre. Elle rêve de jouer La Mégère apprivoisée, et aurait bien aimé faire partie de la famille princière de Monaco. On ne sait pas encore si, en scène, elle donnera le change, mais on est au moins sûr qu’elle possède les clés de son personnage.

François Lafon

Novello Theatre, Aldwich, Londres. Avant-premières à partir du 30 septembre, générale le 12 octobre. Tél. 0844 482 5170.

samedi 25 septembre 2010 à 15h10
  • Forum Yahoo questions réponses, 18 septembre :  « Une publicité pour Tropicana passe en ce moment à la radio. On entend un homme vanter les mérites des jus de fruit de la marque, et la pub comporte deux extraits musicaux, le premier est de la musique classique, il y a une femme qui chante (opéra ?). Le second est plus actuel, c'est le nom du premier que je cherche. C'est une musique connue, mais impossible de se rappeler du nom. »
  • Comment ça marche.net, 25 septembre : « Bonjour. Je recherche le nom de la musique classique de la pub Tropicana. Il me semble que c'est " Bach - Suite n°1 en Sol majeur BWV 1007 Prélude" Mais je n'en suis pas certain. De plus on y entend (dans la pub) une voix de femme».
  • Musique de pub.tv, 8 septembre : « J’ai entendu ce matin-même sur Virgin Radio une pub pour Tropicana. 2 chansons passent dans cette même pub, c’est la 2nde que je recherche. J’ai enregistré le très court passage de 6 sec. En fait, j’ai déjà entendu cette chanson autre part et je crois que « l’envolée » à la voix est plus importante un peu plus tard. »

Scénario de la pub en question : pour cueillir les fruits et préparer Tropicana, on fait comme ci (musique classique). Mais après, dans votre estomac, ça fait comme ça (musique de dance). Il y a plusieurs scénarios, plusieurs « duos » de musique. Rien que des tubes, bien sûr : la 1ère Suite pour violoncelle de Bach, l'Ave Maria de Schubert, le 21ème Concerto pour piano de Mozart. Message officiel : à qualité classique, résultat détonnant. En d'autres termes, le  classique c’est ennuyeux, le moderne c’est beaucoup mieux. L'important, c'est qu'il y ait des internautes qui flashent sur la partie classique. Merci Tropicana !

François Lafon

Entractes sans ennui jusqu’au 31 décembre au Théâtre des Champs-Elysées, avec l’exposition Jean-Louis Barrault et la musique, à l’occasion du centenaire de la naissance du grand homme. Pourquoi le TCE, où Barrault n’a jamais joué ? Parce que c’est là qu’ont lieu actuellement les concerts Janine Roze (ceux du dimanche matin, et, parfois, du soir), lancés, grâce à Barrault, au Théâtre d’Orsay, et que Janine Roze est une fidèle.  Elle a réuni des documents connus, et d’autres très rares, dont les  guest stars sont Pierre Boulez - Monsieur musique de la Compagnie Renaud-Barrault -, Arthur Honegger, Francis Poulenc et Darius Milhaud, qui écrivaient pour Barrault des musiques de scène de la même manière qu’André Masson ou Christian Bérard lui brossaient des décors, Grace Bumbry en Carmen (au MET de New York), ou le couple Jean-Louis-Madeleine dansant à Saint-Germain avec Boris Vian. On y découvre aussi que si Barrault n’a pas joué au TCE, il en a fréquenté les toits, en 1937, alors qu’il répétait Numance de Cervantès à la Comédie des Champs-Elysées. Ce sont deux fresques en grand large courant autour de la salle, qui donnent une sensation de mouvement perpétuel, comme pour montrer que Barrault n’a jamais cessé de valser avec la musique, ou plutôt autour d’elle, lui qui avouait : « Je ne connais pas la musique. J’ai été mal élevé, d’une façon un peu sauvage, sans orientation. J’aime la musique physiquement, d’abord parce que je suis danseur, instinctivement danseur ». Quatre Concerts du dimanche matin, une projection de La Vie parisienne au Palais Royal, une Symphonie fantastique au musée d’Orsay, le ballet de José Martinez  tiré des Enfants du paradis au Palais Garnier illustrent en musique le parcours Barrault, une vie sur scène, qui dure toute la saison, et nous emmène du Théâtre de l’Atelier à la Comédie Française, du Grenier des Grands-Augustins au Théâtre Marigny, de la Cinémathèque à l’Odéon, du Théâtre du Rond-Point au Centre National du théâtre. Tout cela à fond privés, ceux de Pierre Bergé, entre autres, qui a contribué à forger la légende tandis que Saint-Laurent créait pour Madeleine Renaud des robes simples et chic. « Barrault ? Connais pas », entend-on jusque dans les couloirs du Conservatoire (de musique, bien sûr, mais même d’art dramatique). Question de génération, certes. Mais maintenant, on n’a plus d’excuse. 

François Lafon

mercredi 15 septembre 2010 à 11h00

Un sujet pour Binet, dont on espère qu’il ne tardera pas trop à livrer  la suite de son album Haut de Gamme (Dargaud). Nous sommes le dimanche 12 septembre devant la cathédrale d’Angoulême, à la sortie de la grand-messe. « Un monsieur que je ne connaissais pas m’attendait, rapporte l’organiste Frédéric Ledroit dans les colonnes de La Charente libre. Il a commencé par un véritable interrogatoire en me demandant si j’étais croyant. Il m’a dit que je jouais trop fort, que je l’avais empêché de prier, que ma musique était cauchemardesque. Je rentre d’un concert en Italie, j’ai fait de nombreux disques, je suis reconnu. On peut ne pas aimer ce que je fais, mais là, j’ai senti de la haine ». L’organiste reçoit un second coup sur la tête quand son agresseur verbal se présente : « Jacques Millon, préfet de Charente ». « Je lui ai simplement dit que les orgues étaient trop puissantes compte tenu de la taille de la cathédrale, se défend ce dernier, qui n’est autre que le frère de Charles Millon. Je me suis exprimé en tant que paroissien. Si je lui ai dit que j’étais le préfet, c’est uniquement par honnêteté ». Conclusion de Frédéric Ledroit : « Quand un Etat se met à vouloir bâillonner les artistes, cela fait très peur ». Là, l’artiste extrapole peut-être un peu. Il est vrai que par les temps qui courent, l’Etat est dans un si drôle d’état…

François Lafon

Emergeant du déluge de commentaires sur Claude Chabrol : « Lui qui était un grand mélomane… » Ouf ! Quelqu’un l’aura dit (Isabelle Huppert ? Marin Karmitz ?). Dans le cinéma français des années 1960, baigné - dans le meilleur des cas -  des « à la manière de » de Georges Delerue (Stravinsky, Bartok, Strauss, Hermann), les films de Chabrol détonnaient, si l’on ose dire. Qu’est-ce que c’était que ces musiques étranges, dissonantes, qui avaient l’air de se moquer des acteurs et de contredire le metteur en scène ? Chabrol, que les mélodies  aimables de Paul Misraki ne contentaient plus, était allé chercher Pierre Jansen, un pur et dur de l’avant-garde, disciple d’Ernest Bour et Bruno Maderna. Les valses  déglinguées de Landru, le trio bourgeois (piano-violon-violoncelle) de La Femme infidèle, le clavecin perce-oreille du Boucher, la Symphonie concertante pour orgue, piano et orchestre de La Décade prodigieuse, c’était lui. Pour élargir l’univers avant-gardiste de son musicien, le cinéaste lui faisait écouter Britten et Chostakovitch, deux bêtes noires des fidèles de Darmstadt. Quand, dans les années 90,  Matthieu Chabrol, fils de Claude, a succédé à Jansen, là le public n’a pas été dépaysé : mêmes dissonances, mêmes mariages instrumentaux hors normes. Musique et gastronomie : une recette chabrolienne. Quel meilleur moyen de nous faire entrer dans la tête de ces bourgeois qui ruminent des pensées inavouables dans des intérieurs raffinés ? Dans La Cérémonie, les domestiques assassinent les maîtres pendant qu’ils regardent Don Giovanni à la télévision. Encore une histoire de dissonance. 

François Lafon

541 000 spectateurs samedi pour le premier acte de Rigoletto, diffusé en direct et en prime time. Pour l’amour de l’opéra, France 3 se retrouve pour la première fois 9ème dans les audiences de la soirée (un trente-cinquième des téléspectateurs), derrière W9 (Les Simpson) et TMC (Navarro). Les actes 2 et 3 ont été donnés le lendemain, respectivement à 14h15 et à 23h30, pour suivre l’action en temps réel, ce qui montre que la production n’a pas cherché l’audience à tout prix (les résultats n’ont pas été meilleurs dans les 148 pays où  l’opéra a été retransmis).  Placido Domingo en tête d’affiche, Zubin Mehta à la baguette et Marco Bellochio à la caméra, l’effet « dramatique  en direct » hérité de l’époque héroïque de la RTF : on est mal venu de faire remarquer que la montagne a accouché d’une souris. Et pourtant… Est-ce le marbre des palais de Mantoue qui a refroidi le feu sacré ? Est-ce Domingo, dont la reconversion en baryton est - vocalement - problématique ? Est-ce Verdi qui ne s’accommode pas du gros plan permanent voulu par Bellochio ? Toujours est-il qu’une fois encore, l’opéra a rejeté le confort moderne. Reste la beauté du geste, ce qui n’est pas si mal dans le paysage audiovisuel actuel.  

François Lafon

lundi 6 septembre 2010 à 11h00

Marché  classique, ton univers impitoyable… Le critique anglais Norman Lebrecht, sur son blog Slipped Disc, en tire un véritable feuilleton. En vrac : Gustavo Dudamel, qui avait suivi son agent en rupture de bail, se retrouve, à la suite d’un nouveau clash, seul client dudit agent. Dix-neuf artistes, parmi lesquels la mezzo soprano Joyce DiDonato,  suivent le leur et quittent le géant IMG pour le plus petit Intermusica. Le département « artist management » d’Universal, créé pour  renflouer la multinationale du disque en pleine crise, perd une à une ses têtes d’affiches. Les chanteurs Elina Garanca, Barbara Frittoli et Luca Pisaroni sont d’ores et déjà démissionnaires, et un autre gros poisson (un ténor ?) serait lui aussi sur le départ. Les pertes, à chaque fois, se chiffrent en moyenne à 550 000 dollars (430 000 euros) par tête, et l’amalgame agence/maison de disques met en jeu à la fois la carrière scénique et discographique des artistes. Cuisine interne, négligeable en regard des sommes annoncées lors des incessants transferts de pop stars ? Peut-être, mais à faire ainsi jouer les mini pop stars aux artistes classiques, on fait d’eux des « produits » à but  essentiellement lucratif. Les albums fast food qui en résultent n’en témoignent que trop.

François Lafon

jeudi 2 septembre 2010 à 08h47

Qu’est-ce qui fait qu’une musique nous touche, et une autre pas, qu’un interprète nous bouleverse, et qu’un autre nous laisse froid ? C’est une histoire de cœur, répond le Heart Chamber Orchestra. Rien de sentimental dans sa démarche. De la science, rien que de la science. Sur scène : des musiciens avec leurs instruments. Devant chacun d’eux : un ordinateur portable. Derrière eux : un double écran géant. La musique qu’ils jouent est générée en direct par leur rythme cardiaque, lequel détermine aussi les dessins que l’on voit sur l’écran. A mesure qu’ils s’échauffent, le rythme s’accélère et les dessins se compliquent. Beethoven et Bartok n’ont pas fait autre chose, direz-vous, et sans ordinateur ni électrocardiogramme. Eh bien si, justement, ils ont fait autre chose, car les variations cardiaques du Heart Chamber Orchestra feraient bâiller les derniers fans de la musique new age. Il faudrait que ces pionniers s’essayent à Beethoven et Bartok, ou qu’ils prêtent leur matériel au Philharmonique de Berlin. Ce qu’on verrait sur l’écran serait peut-être terrifiant, mais la musique aurait plus de cœur

François Lafon



 

 

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