Au moment où le Français Dominique Meyer prend la direction de l’Opéra de Vienne, Actes Sud sort un petit livre d’André Tubeuf sur ledit Opéra. Tubeuf, bien connu des amateurs, a un style bien à lui, à la fois parlé et complexe, avec un don pour la formule évocatrice, la surenchère hypnotique, le raccourci qui en dit long. Quiconque ne connait pas le sujet sur le bout des doigts se perd dans ces énumérations de chanteurs, de chefs, d’œuvres et de rôles, et pourtant, comme le dit Meyer dans sa préface, « il vous communique une envie irrésistible d’aller fouiller les bacs des disquaires, afin de parcourir, en sa compagnie, le chemin initiatique de ses propres découvertes ». Ce n’est pas une étude critique que Tubeuf propose de l’Opéra de Vienne, mais une légende dorée. Vienne est la ville la plus réactionnaire du monde ? Oui, et alors ? Mahler, en 1900, Lorin Maazel, quatre-vingts ans plus tard, y ont fait les frais de l’antisémitisme local ? Ce n’est pas le propos. Rêvons ensemble à un opéra idéal, où une troupe faite de stars entretient une tradition, laquelle témoigne de toute une civilisation. Les yeux de l’amour, en somme. C’est bien de ce point de vue que tout un public conçoit encore l’opéra.
François Lafon
André Tubeuf : L’Opéra de Vienne. Actes Sud, 28 euros.