Il n’y a pas que le football qui fasse fonctionner l’ascenseur social. Mercredi 23 juin, à la Salle Pleyel, un curieux ensemble de cordes joue des transcriptions d’œuvres célèbres. A sa tête : John Eliot Gardiner en personne. Les instrumentistes sont des ados, voire des enfants, venus de toute l’Ile-de-France : conservatoires, collèges, associations. Ils ont été coachés par des membres du London Symphony Orchestra : neuf séances faisant suite à six mois de travail avec leurs professeurs français. L’opération est intitulée Take a bow (au propre : « Prends un archet » ; au figuré : « salue le public », ou encore « Tire ta révérence », titre d’une chanson à succès). Le LSO, depuis son QG de St Luke’s Church, à Londres, s’est fait une spécialité de cette pédagogie directe. Gardiner renchérit : « L’enseignement de la musique en France est confit dans l’académisme. Donnons aux jeunes l’envie de s’amuser ». Très tendance, Sir John : à Caracas, Gustavo Dudamel fait de l’orchestre symphonique un big band classique ; à Baltimore, Marin Alsop compose un ensemble avec des amateurs et des déçus du métier. Les croque-morts en queue de pie ranimant la flamme de Mozart et Beethoven n’attirent plus les foules. N’empêche : dans la fosse de l’Opéra Comique, où Gardiner dirige Pelléas et Mélisande, les membres du très british Orchestre Révolutionnaire et Romantique n’ont pas l’air de plaisantins. Les jeunes de Take a bow non plus. Outre-Manche, travailler dans la joie n’a peut-être pas le même sens qu’ici.
François Lafon