Au Palais des Beaux-Arts de Bruxelles, exposition Antoine Watteau, la Leçon de musique. Fêtes galantes ou scènes intimes, un tiers des toiles de Watteau met en scène des instruments et des instrumentistes. Chez son mécène Pierre Crozat, le peintre a entendu beaucoup de musique, vu beaucoup de musiciens. Aux quinze toiles, aux trente dessins « musicaux » de Watteau s’ajoutent des partitions, des instruments de l’époque, une cinquantaine d’estampes destinées à promouvoir ses œuvres et signées Boucher ou Cochin. William Christie, commissaire général de l’exposition, a programmé un cycle de concerts, et Harmonia Mundi produit un luxueux double livre-disque en forme de galerie sonore suivie d’un concert chez Pierre Crozat, où musique italienne et musique française (extraits tirés du catalogue maison) illustrent l’art très particulier de Watteau. Car de même qu’il y a des tableaux qui émettent des vibrations et d’autres qui sont inertes, la peinture de Watteau n’évoque pas d’univers sonore évident. Qui sont ces gens ? Des nobles ? Des paysans ? Des nobles jouant les paysans ? Des acteurs jouant les nobles et les paysans ? Des musiciens ? Des figurants ? Les vrais musiciens jouent-ils en coulisse ? Jouent-ils de la musique noble ou paysanne ? Les fêtes galantes sont-elles des scènes de théâtre, les jardins de rêve des toiles peintes ? Watteau lui-même n’était apparemment pas musicien. En ce temps où l’imitation de la nature semblait plus vraie que la nature elle-même, la musique était-elle ce que l’on croit aujourd’hui ? Ce génie de l’incertitude est peut-être la clé pour mieux écouter Rameau et Couperin, Rebel et Corelli. A expérimenter.
François Lafon
Bruxelles, Palais des Beaux-Arts, du 8 février au 12 mai. www.bozar.be - La Musique de Watteau, 2 CD Harmonia Mundi
Photo : Watteau - La Partie carrée © DR