Le maître chanteur de Minsk de Morley Torgov chez Actes Sud, ou Wagner héros de roman policier. C’est la deuxième enquête d’un Sherlock Holmes allemand nommé Hermann Preiss, la première (Meurtre en la majeur – 2010) mettant en scène Robert et Clara Schumann, la troisième (en prévision) promettant un affrontement entre Liszt et le directeur de cirque Phineas Taylor Barnum. L’auteur, très connu au Canada et venu sur le tard au polar (il a 85 ans) reprend à son compte la formule d’Alexandre Dumas « On peut violer l’histoire, pourvu qu’on lui fasse de beaux enfants », et ficelle habilement une fantaisie à suspense autour de la création à Munich des Maîtres chanteurs de Nuremberg en 1868. Petit jeu pour amateurs du genre : traquer l’anachronisme (parlait-on à l’époque de « conflit d’intérêt » ?) et savourer l’invraisemblance (un chanteur d’opéra prenant un bain de vapeur une heure avant d’entrer en scène). Mais à la différence de Dumas, Morley Torgov omet de soigner les détails qui font sérieux, même si l’attribution, dès le premier chapitre, du rôle de Beckmesser à un ténor ne risque de faire tiquer que les spécialistes.
François Lafon
Le maître chanteur de Minsk, de Morley Torgov, traduit de l’anglais par Céline Schwaller. Actes Sud « Actes noirs », 368 p., 22,80 €