Exposition Rameau et la scène à la Bibliothèque-Musée de l’Opéra de Paris. Retour à la maison-mère pour clore le 250ème anniversaire de la mort du génie longtemps mal-aimé. Manuscrits, éditions originales, estampes et maquettes (« De l’écriture à la représentation »), photos et costumes d’un siècle de redécouverte et de recréation des œuvres (« Du Purgatoire à la lumière ») : beaucoup à voir et à lire compte-tenu de l’exiguïté des lieux, des documents rares pour la plupart issus du fonds maison. En milieu de parcours : un grand mur bleu nuit sur lequel sont inscrites, comme sur un tombeau, les grandes reprises à l’Opéra, depuis Hippolyte et Aricie (mise en scène de Paul Stuart, avec Lucienne Bréval en Phèdre - 1908) jusqu’à … Hippolyte et Aricie (mise en scène d’Ivan Alexandre – 2012) en passant par Castror et Pollux, Les Indes galantes, Platée, Dardanus et Les Boréades, soit six des vingt-huit ouvrages scéniques (tragédies et comédies lyriques, opéras-ballets, pastorales héroïques, etc.) composées entre 1733 par un débutant âgé de cinquante ans jusque-là spécialisé dans la musique instrumentale et 1764, date de sa mort et du report sine die de la création de ses ultimes Boréades. Sous l’hommage donc, la moins glorieuse réalité : trente ans et plus après le déferlement de la vague baroqueuse, Rameau n’est toujours pas une valeur sûre et seuls ses blockbusters (si l’on peut dire) figurent au répertoire de l’Opéra. Côté mise en scène, reconstitueurs et actualiseurs continuent pourtant – les seconds distançant les premiers, en nombre tout au moins – à chercher les moyens les plus efficaces de résoudre les problèmes dramaturgiques posés par ce théâtre d’un autre temps, la partie musicale étant une fois pour toutes dévolue au tenants de la philologie. Un work in progress, veut-on croire, plutôt qu’une cause perdue.
François Lafon
Bibliothèque-musée de l’Opéra National de Paris, Palais Garnier, jusqu’au 8 mars 2015 Photo © DR