Dans la revue britannique Brain (Cerveau), relayée en France par Pierre Barthélémy dans son blog scientifique, le neurologue Oliver Sacks, auteur de Musicophilia et de L’Homme qui prenait sa femme pour un chapeau, évoque le cas de huit de ses patients atteints d’hallucinations particulières : ils voient des partitions musicales partout. Tous sont âgés, musiciens amateurs plus ou moins confirmés, et quatre d’entre eux souffrent d’affections visuelles importantes (glaucome, dégénérescence maculaire). Certains ont essayé de jouer au piano la musique qui leur apparaissait, mais outre qu’elles se modifiaient sans cesse, les partitions étaient incroyablement compliquées : grappes de notes inextricables, rangées incompréhensibles de dièses et de bémols, graves descendant six lignes au-dessous de la portée. Les quatre patients malvoyants relèvent probablement du syndrome de Charles Bonnet (hallucinations visuelles affectant des personnes âgées ne présentant pas de troubles mentaux - 1770). Mais les quatre autres ? Deux sont parkinsoniens, un troisième a été victime de fortes fièvres et le dernier ne voit de musique qu’au moment où il se réveille. Sacks, qui souffre lui-même de problèmes de vue et a tendance à voir un mélange de lettres et de runes s’imprimer sur les murs de sa chambre, en déduit que lorsque la chaîne de l’information visuelle est rompue pour une raison quelconque, le cerveau prend le relais et réactive des images parfois venues de très loin. A remarquer que ces hallucinations ont un point commun : elles sont impossibles à traduire en sons. « On vient de trouver la cause de la musique contemporaine », ironise un internaute. En aucun cas ceci n’explique cela.
François Lafon