En plein air, à la lumière du jour, dans des lieux inattendus (Parc Floral de Paris, caserne de pompiers Sévigné, Musée de la Vie romantique - quand ce ne sont pas des endroits tenus secrets jusqu’au dernier moment), trois comédiens jouent Le Shaga de Marguerite Duras. Pas de musique, ou plutôt si : Jean-Marie Lehec, Karine Martin-Hulewicz et Claire Deluca - actrice durassienne historique et créatrice de l’œuvre en 1968 – jonglent pendant une heure avec une langue inventée, que l’un (l’une) d’entre eux se met à parler, déréglant jusqu’à la folie le discours des autres. A l’époque, Duras, pas encore entrée dans sa propre légende, visait le théâtre de l’absurde selon Ionesco, Pinget et les autres. Aujourd’hui, c’est une sorte de dépassement du langage que nous entendons, une manière de communiquer dont les ressorts ne sont pas si éloignés de ceux de la musique. Ce soir dans la cour XVIIIème (hôtel de Lamoignon) de la Bibliothèque historique de la Ville de Paris : deux cents fans assis sur le pavé, ravis quand une mouette jette son cri au moment où la pièce parle d’oiseaux. Le spectacle, léger (seul accessoire : un bidon d’essence), tourne depuis 2008, avec une escale la saison dernière à l’Athénée. On n’entend plus si souvent la musica durassienne sonner avec cette évidence des premiers jours.
François Lafon
Jusqu’au 5 août, lieux variés - Rencontre avec l’équipe dimanche 29 juillet 16h30, librairie Le Monte en l’air, Paris 20ème. Renseignements et réservation : www.quartierdete.com Photo © DR