Comme on est salé ou sucré, mer ou montagne, Balzac ou Flaubert, Brahms ou Wagner, Callas ou Tebaldi, on a longtemps été Schwarzkopf ou Della Casa. Les deux sopranos ayant des répertoires assez similaires, on préférait - ou pas - la sophistication de l’une à la spontanéité de l’autre en Comtesse des Noces de Figaro ou en Maréchale du Chevalier à la rose. Lisa Della Casa, qui vient de mourir à quatre-vingt treize ans, était donnée aussi comme la principale victime collatérale – avec Sena Jurinac et Teresa Stich-Randall – de l’association Elisabeth Schwarzkopf – Walter Legge, la diva et son producteur, lequel ne supportait qu’une seule rivale à son égérie et épouse : Maria Callas, l’autre diva labellisée EMI. Della Casa, belle comme Schwarzkopf, glamour comme elle, mènera quand même une belle carrière, y compris au disque, principalement sous l’étiquette Decca. Ceux qui la préféraient ont même connu une petite revanche, en 1999, quand Deutsche Grammophon a officiellement édité le live du Chevalier à la rose 1960 à Salzbourg sous la baguette de Karajan, production filmée, mais avec Schwarzkopf en Maréchale. Mais leur plus belle revanche, c’est Arabella, autre ouvrage sucré-salé de Richard Strauss, où Schwarzkopf n’était que bonne, et Della Casa sans rivale.
François Lafon