Mardi 8 octobre 2024
Le cabinet de curiosités par François Lafon
La petite Renarde rusée, au centre des événements
mercredi 3 juillet 2019 à 00h26
« Week-end finale » de la saison à la Philharmonie de Paris-Cité de la Musique : après Samstag aus Licht de Stockhausen (voir ici), La petite Renarde rusée de Janacek, mise en scène de Peter Sellars et London Symphony (and Chorus) dirigé par Simon Rattle. Une version grand format (salle Pierre Boulez exige) et pourtant minimaliste de ce conte panthéiste et chef-d’œuvre animalier, pour ne pas dire manifeste antispéciste avant la lettre (1924), casse-tête pour les metteurs en scène (jusqu’où va l’anthropomorphisme ?). Un écran géant derrière l’orchestre, une estrade blanche devant, podium élargi du chef placé au centre des événements : on pense aux Larmes de Saint Pierre d’Orlando de Lasso, déjà « animé » par Sellars en avril dernier (même lieu), mais aussi au Tristan et Isolde de l’Opéra Bastille, où l’action, sobrement contée à l’avant-scène, était occultée par les photos-vidéos de Bill Viola (fascinantes il est vrai). Ce soir, les vidéastes Nick Hillel et Adam Smith se chargent de la partie réaliste : nature et culture, alliage plus compliqué que ne l’implique au premier abord cette fable inspirée d’un feuilleton dessiné paru dans un journal. Vêtus de noir, sans accessoires ni maquillage, présences alla Sellars (génie du geste simple qui en dit long), les chanteurs illustrent les cycles de la vie et les rapports entre les créatures, jusqu’au lien charnel qui unit le Garde forestier et la petite Renarde. Rattle agit de même avec un London Symphony de plus en plus à sa main, parcourant toute la gamme des émotions, depuis les murmures de la forêt (morave) jusqu’aux épanchements du duo entre le Renard et la Renarde. Plateau sans faute, dominé par Lucy Crowe dans le rôle-titre (on pense à la grande Lucia Popp) et Gerald Finley, pas si loin en Forestier de Hans Sachs (Les Maîtres-chanteurs de Nuremberg, son rôle favori) méditant sur le temps qui passe et la vie qui se renouvelle. Et chapeau à la Maîtrise de Radio France, à la hauteur d’un tel cast
François Lafon  

Philharmonie de Paris, Grande Salle Pierre Boulez, 2 juillet (Photo © Monica Rittershaus)

 

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