La Saxe à l’époque de Bach n’est pas un royaume. Elle ne le deviendra qu’en 1806, par la grâce de Napoléon. Son souverain est de 1697 à 1733 l’électeur Friedrich August Ier, en même temps roi de Pologne sous le nom d’Auguste II le Fort. Il a, pour obtenir cette dignité royale, abjuré le luthéranisme pour le catholicisme, mais - exception notable - sans obliger ses sujets saxons à en faire autant. La Saxe luthérienne a donc une cour catholique. Dans sa capitale, Dresde, fleurit l’opéra italien, alors qu’à Leipzig, où Bach est cantor, la musique est luthérienne. Lorsque meurt en 1727 Christiane Eberhardine, duchesse de Saxe et reine de Pologne, qui contrairement à son mari est restée luthérienne, Bach compose une Trauerode (Ode funèbre), exécutée à Leipzig par les étudiants lors d’un service commémoratif. Françoise Lasserre et l’Ensemble Akadêmia l’ont programmée à La Chaise Dieu, suivie par le Magnificat, en ce lieu œuvre « de résistance », si l’on peut dire. Avec Jan Dismas Zelenka, natif de Bohême et musicien de cour à Dresde, on ne quitte pas les sommets. Il étudia à Vienne, et ses quelque vingt messes réussissent une synthèse rare de ferveur, d’éclat et de dynamisme, comme plus tard celles de Haydn. Vaclav Luks et le Collegium & Collegium Vocale 1704 avaient mis Zelenka à l‘honneur au festival 2013. Ils ont récidivé cette année avec la Missa Divi Xaverii, composée en 1729 à la gloire de saint François Xavier, patron de Maria Josepha, épouse du futur Friedrich August II (et August III de Pologne), alors enceinte : ouvrage splendide, pour quatre solistes vocaux (souvent traités de façon très « moderne »), chœur et un important effectif instrumental, trompettes et timbales intervenant aux endroits les plus inattendus. Grand succès, comme en début de concert pour un concerto de Heinichen et la messe brève en sol mineur de Bach.
Marc Vignal
Abbatiale Saint-Robert, La Chaise Dieu, 25 et 26 août Photo © DR