Floraison d’articles dans la presse internationale à l’annonce de la mort de Wolfgang Sawallisch. Enumération de ses titres de gloire, de ses postes prestigieux, de ses enregistrements de référence. Et puis quoi ? Et puis rien. Rien sur sa personnalité ni sur son art de chef et de pianiste accompagnateur, sinon en creux : il a travaillé avec les plus grands, dans les plus grandes maisons, il a collectionné prix et distinctions, il est donc lui-même un grand. Les éloges décernés dans les discographies sont en creux eux aussi : ses Wagner de Bayreuth (Philips) sont plus véloces, donc plus modernes que ceux des dinosaures des générations précédentes, ses Symphonies de Schumann (EMI) remarquables par leur objectivité, sa Flûte enchantée (idem) admirable pour son équilibre classique. Dans les années 1990, il avait dirigé un cycle Beethoven avec l’Orchestre de Paris : du style, du métier, rien à dire là-dessus. L’aura des Kapellmeister en fin de carrière (Günter Wand, Herbert Blomstedt) lui aura aussi échappé. Wolfgang Sawallisch était le chef mystère. La seule chose dont on était sûr, quand il levait la baguette, c’est qu’il y avait un pilote dans l’avion, et que celui-ci arriverait à bon port, sans turbulences ni trous d’air. C’est aussi tout ce qu’on peut lui reprocher.
François Lafon