Mercredi 11 décembre 2024
Concerts & dépendances
A l’Opéra Comique, 1610ème représentation depuis sa création en 1883 de Lakmé de Léo Delibes. Sabine Devieilhe, qui y avait succédé à Natalie Dessay en 2014, reprend du service dans le rôle-titre, parangon de difficulté vocale s’adressant à une colorature stratosphérique comme il y en a peu par génération. C’est cette fois son époux Raphaël Pichon qui est au pupitre de son ensemble Pygmalion (chœur et orchestre), expliquant que « Lakmé pourrait être une première Mélisande, émanant d’un ailleurs fantasmé ». Même son de cloche du côté du metteur en scène Laurent Pelly, lequel s’est donné pour mission de représenter le choc des cultures faisant de l’ouvrage une œuvre charnière jonglant avec les codes lyriques de l’époque et ouvrant la porte à l’opéra du XXème siècle (Pelléas encore…), se réclamant du choix par Pichon de la version originelle avec dialogues parlés pour accentuer la dichotomie entre les Anglais bornés et les Hindous vivant « dans un monde léger, peut-être comme les pages d’un conte ». Le résultat est plus sage qu’on l’aurait espéré, laissant la première place à la « dramaturgie musicale » définie par le chef, que l’on n’attendait pas dans un tel répertoire et qui s’y révèle très à son aise. Et comme l’ouvrage est d’abord une affaire de voix, le public ravi est à la fête : toujours un peu distante dramatiquement mais maîtrisant mieux que jamais le Stradivarius qu’elle a dans la gorge, Sabine Devieilhe n’a pour rival à l’applaudimètre que son partenaire de luxe Stéphane Degout, lequel donne une épaisseur inaccoutumée au brahmane Nilakantha, tandis que face à ces étoiles de première grandeur l’élégant ténor Frédéric Antoun défend vaillamment le Britannique Gérald risquant sa vie à traverser le miroir accédant au monde spirituel des Hindous par amour pour la pure Lakmé. Mention spéciale à Mireille Delunsch poursuivant sa seconde carrière en Miss Bentson, Anglaise d’opéra-comique ne risquant pas, elle, de traverser ledit miroir. 
François Lafon 

Opéra Comique, Paris, jusqu’au 8 octobre (Photo © Stéphane Brion) - En direct sur Arte Concert le 6 octobre à 20h - Sur France Musique le 22 octobre à 20h

vendredi 9 septembre 2022 à 23h47
A la Philharmonie de Paris, ouverture de la saison de l’Orchestre de Paris. Programme osé : il reste des places ce vendredi, deuxième exécution du même programme. A l’affiche : Richard Strauss et Scriabine, mais aussi Kaija Saariaho, Jimmy Lopez Bellido et Pascal Dusapin. « C’est le festival Présences » remarque une dame avertie. Est-ce le signe qu’un cap est passé, que sous la direction du jeune Klaus Mäkelä, l’orchestre rejoint résolument son époque au risque de bousculer son public « tradi » ? Le chef, en tout cas, y est comme un poisson dans l’eau, suivi par les musiciens en forme des grands soirs. Toutatis (Saariaho), qui ouvre ce bal de la démesure ? Une pièce de cinq minutes, composée dans le sillage des Planètes de Holst, où l’on suit un astéroïde animé de mouvements contraires, mais aussi un prélude tout trouvé à Ainsi parlait Zarathoustra (Strauss), comme une rampe de lancement de la célèbre Introduction en do majeur/do mineur. Aino (création mondiale), « poème symphonique » du Péruvien Lopez Belindo inspiré du Kalevala, épopée nationale finlandaise ? Une transition généreusement illustrative entre Strauss et Scriabine, dont le Poème de l’extase, poème orgiaque (titre provisoire) où le grand Russe réconcilie Wagner et l’impressionnisme français, clôt le programme. Entre les deux vient une pièce solitaire (Dusapin), création mondiale elle aussi, astéroïde étincelant lancé tel un monde en transformation. Dans A linea, c’est-à-dire « allez à la ligne », « à la fin, rien ne ressemble au début », commente le compositeur. C’est là peut-être le fin mot de ce concert des extrêmes, où le chef fait plus que jamais figure de surdoué devant ses musiciens prêts à le suivre très loin. La soirée est dédiée à Lars Vogt, formidable pianiste et chef prématurément disparu cette semaine. Un signe aux étoiles, là encore.
François Lafon

Philharmonie de Paris, Grande salle Pierre Boulez, 9 septembre. Concert du 8 sur France Musique pendant un an, gratuitement en streaming sur Medici.tv pendant 90 jours et sur Philharmonie Live pendant 6 mois (Photo © DR)
 
 

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