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Rencontres musicales de Vézelay 4 : Laudes
jeudi 31 août 2017 à 21h54
Avec Martin Luther en héros de leur concert à Saint-Père, l’ensemble Musica Nova de Lucien Kandel ne risquait guère d’engendrer des rires du côté du public – qui ne reprit pas pour autant en chœur les amen des cantiques chantés… En rendant hommage aux premiers compositeurs de la musique luthérienne associés à la Réforme, Musica Nova suivait le vœu d’une nouvelle pratique religieuse initiée par la figure allemande du protestantisme : « pour qui le chant était un élément essentiel de la dévotion », selon le musicologue Nicolas Dufetel dans sa présentation du concert. Luther, ermite augustin – qui, dans une lettre au compositeur Ludwig Senfl écrivait « Mon âme déborde et bouillonne d’amour pour elle [la musique], qui bien souvent m’a consolé et délivré de grandes peines » –, sollicita plusieurs compositeurs, en particulier Johann Walter (1496-1570), pour qui il rédigea plusieurs livres de chant. Apprécié notamment dans Machaut, Desprez, Willaert et Ockeghem, Musica Nova retrouve au sein d’un lieu de culte la ferveur et la pureté de ses voix tant cultivées et appréciées sur disque. Ni vedettes ni fioritures : à quatre, six ou huit, les voix s’harmonisent, s’entrelacent, s’éloignent et se passent le relais pour s’unir dans une éternité qui résonne sous les voûtes  – d’autant plus que les pièces de Walter, Senfl et Sixtus Dietrich s’articulent entre de brèves lectures de Luther (textes théoriques et Propos de table) et de Walter (lettre) bien utiles pour comprendre les enjeux moraux et esthétiques de la polyphonie luthérienne. 
 
Avec un saut de deux siècles, la ferveur religieuse jubile d’une tout autre manière avec Mozart, à l’affiche du concert clôturant ces Rencontres, le soir avec l’Académie Arsys Bourgogne et l’Orchestre Dijon Bourgogne – beaucoup de monde sur scène ! – dirigés par le chef d’orchestre Mihaly Zeke. D’entrée, le célèbre Exsultate jubilate KV 165 trépigne derrière le soprano de Sibylla Rubens, voix britannique sans étincelle peu concernée par le caractère juvénile d’une partition composée à l’âge de 17 ans — qui plus est destinée à un castrat, en 1773. Dernière œuvre chorale de Mozart, les Vêpres solennelles d’un confesseur KV 339 atteignent la grandeur nécessaire sous la baguette enthousiaste de Mihaly Zeke, qui préside aux destinées d’Arsys depuis 2015 et qui connaît bien la formation dijonnaise. De la fraîcheur, du rythme et de la complicité entre les quatre solistes, le chœur et l’orchestre — avec une mention spéciale pour la soprano Lise Viricel, voix séraphique issue des rangs d’Arsys, pénétrée par la grâce du Laudate dominum. Retenez son nom ! Un souvenir de plus pour ces Rencontres de Vézelay, qui annoncent pour leur prochaine édition au moins deux des trois soirées de 21h avec l’ensemble Pulcinella, dans La Résurrection et l’Ascension de Jésus de Carl Philipp Emanuel Bach, Aedes et Les Siècles dans le Requiem de Fauré. Par ailleurs, la Cité de la Voix entame une nouvelle résidence de deux ans avec le baryton Arnaud Marzorati et sa Clique des Lunaisiens (voir ici) – remarqués récemment pour son spectacle « Votez pour moi ! », à Paris (Bouffes du Nord), en juin dernier, et dont les Rencontres annoncent déjà en avant-première un spectacle autour du diable, mais pas avant minuit… à Vézelay.  
Franck Mallet
 
26 août, Saint-Père, église Notre-Dame et Vézelay, basilique Sainte-Marie-Madeleine  (Photo : Musica Nova©Valentine Poutignat)
 

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