Création mondiale, hier à Saint-Eustache, d’Art de la fugue odyssée de Pierre Henry. Autour du public : une forêt d’enceintes. Au milieu, le maître lui-même à la console. Seul éclairage : un mur de cierges. Quand il ne transforme pas sa propre maison en henryophone géant pour un public choisi (il l’a encore fait ce printemps), le démiurge de l’électroacoustique aime réunir ses fidèles et faire trembler les voûtes gothiques. « Ce rêve de fugues entrecroisées s’accordant les unes aux autres comme dans un même voyage. Un voyage odyssée-occident-orient où l’âpreté tribale s’oppose à des variations de rites inconnus ». Comprenne qui pourra. Son Bach revisité fuse et tournoie, écrase et élève, mêle orgue, orchestre, voix d’ailleurs et sons non-identifiés. Tout cela se tient, et a même une certaine gueule. En deuxième partie : la Messe de Liverpool, composée en 1967, en même temps que les jerks électroniques de Messe pour le Temps présent, le ballet de Béjart. Les nostalgiques retrouvent le Pierre Henry bruitiste de l’époque, d’autres décrochent. Paris Quartier d’été consacre toute la semaine à ce solitaire touchant et mégalomane : Le Livre des morts égyptien, Ceremony, Requiem profane, 666 d’après l’Apocalypse de Jean sont au programme. Il ne manque que Dieu, son oratorio monstre d’après Victor Hugo.
François Lafon
Pierre Henry, 7 concerts à Saint-Eustache. Jusqu’au 1er août.