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Palais Garnier : La Traviata, dame du « like »
vendredi 13 septembre 2019 à 01h01
Nouvelle Traviata à l’Opéra de Paris, enterrant la version Benoit Jacquot à la Bastille (traditionnel figé – 2014), sur les brisées plutôt de la relecture de Christoph Marthaler (actualisation distancée – 2008), et pas seulement parce qu’elle est, elle aussi, donnée au Palais Garnier. Expert en analyse de l’univers féminin, le metteur en scène suisso-australien Simon Stone, dont l’élisabéthaine Trilogie de la vengeance (Odéon, Paris – 2019) a fait son effet à l’Odéon la saison dernière, transporte la Dame aux camélias dans notre monde numérique : si camélias il y a, c’est sur écran géant, et Violetta accumule les « like » sur les réseaux sociaux, lanceuse de modes et croqueuse d’amants eux aussi soumis aux diktats de la Toile. Le premier acte et le premier tableau du deuxième vont bon train, où l’on passe – scène tournante aidant – de la boite de nuit côté pile (fêtards et paillettes) et face (domestiques et poubelles) aux joies de la campagne, avec vraie vache à traire et vrai raisin dans le fouloir. L’attention faiblit un peu par la suite, où Violetta se fait humilier par Alfredo dépité au milieu d’une partie fine façon Disneyland, et où  elle disparaît dans un halo d’éternité après avoir jusqu’au bout arpenté ladite tournette, retrouvant (effet plutôt réussi) les lieux devenus cauchemardesques de sa gloire passée. Entourée d’une distribution en majorité française, où brille l’impeccable Benjamin Bernheim et où Ludovic Tézier réitère son somptueux père (pas si) noble, la belle Pretty Yende, qui évoque Whitney Houston comme Christine Schäfer rappelait Edith Piaf dans le spectacle de Marthaler, est à la hauteur de l’enjeu, belle prestance et voix brillante, et l’on ne lui reprochera pas de ne distiller l’émotion qu’au dernier acte, jusque-là reine d’un univers pas si éloigné des romans glacés de Brett Easton Ellis. Direction vivante plus que poétique de Michele Mariotti, comme un antidote à ce monde formaté qui est le nôtre. Triomphe pour tous au rideau final, même pour Simon Stone, dont la mise en scène, il est vrai, transpose sans les mettre à mal les codes du mélodrame verdien. 
François Lafon 
Opéra National de Paris, Palais Garnier, jusqu’au 16 octobre. En direct au cinéma et sur Medici TV le 24 septembre (captation de François Roussillon). Diffusion ultérieure sur Radio Classique (Photo©Charles Duprat/OnP)

 

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