Récital Kathia Buniatishvili à l’Orangerie de Sceaux. Un événement presque incongru : le festival de l’Orangerie – quarante-deux ans d’existence, mille quatre cent cinquante concerts – est une institution estivale. Jacqueline Loewenguth, belle sœur du créateur, le violoniste Alfred Loewenguth, y accueille des artistes choisis pour un public d’habitués. Avec cette star de vingt-quatre ans, que s’arrachent orchestres et festivals, c’est le show biz classique qui investit le lieu. Sanglée dans un fourreau en lamé noir (il est 17h30 et l’on peut voir, par les baies, les promeneurs en short), l’artiste attaque la Fantaisie de Schumann dans un esprit de conquête : doigts infaillibles, sonorité variée, mais sur-lignage expressif permanent. Décuplés par l‘acoustique réverbérée de l’endroit, les forte claquent, les piani murmurent, les foucades se font orageuses. Kathia Buniatishvili bouscule la barre de mesure alla Argerich et sollicite le texte. D’émotion, point, ou trop fabriquée pour être communicative. Efficace dans les folies digitales de la Méphisto-Valse de Liszt, le système s’essouffle dans Chopin et tourne au remix dans les 3 Mouvements de Petrouchka de Stravinsky. Public partagé : on adore ou l’on déplore. De quoi alimenter le buzz, puisque c’est de cela, apparemment, qu’il s’agit.
François Lafon