Vendredi 29 mars 2024
Concerts & dépendances
Deauville andalou
lundi 26 avril 2021 à 12h13
Le second concert de l’édition confinée du Festival de Pâques de Deauville, filmé Salle Élie de Brignac et diffusé gracieusement en direct sur ConcertHall, réunissait comme à l’accoutumée de jeunes et méritants interprètes dans des œuvres rares – combinaison gagnante d’un festival qui cultive ainsi sa raison d’être depuis un quart de siècle. Ingéniosité et tonalités allègres ou mystérieuses avec l’Introduction et Allegro pour harpe, flûte, clarinette et quatuor à cordes de Ravel pour débuter, avec la harpiste Coline Jaget bien entourée par un quatuor mené par le violoniste Shuichi Okada, ce soir-là transfuge du Trio Arnold.
Lyrisme ensuite avec Psyché de Falla qui n’a rien à envier à la Lyrique japonaise de Stravinsky, a fortiori dans cette configuration qui associe à la voix un ensemble constitué d’une flûte, d’une harpe, d’un violon, d’un alto et d’un violoncelle. À peine sortie des brumes de sa Mélisande debussyste rouennaise – c’est à côté, ou presque ! – la mezzo Adèle Charvet apporte une chaleur idéale à cette partition si pulpeuse – et quel dommage qu’on ne lui ait pas demandé le cycle entier des Siete Canciones espagnolas du même Falla, nous gratifiant seulement de deux, Jota et Nana, nimbées d’une clarté paradisiaque, avec pour seul accompagnement les arpèges de la harpe de Coline Jaget. Comble de l’expressionnisme cru de Falla ensuite, avec le Concerto pour clavecin et cinq instruments de 1926. Œuvre géniale, « inexpressive » au sens romantique, arcboutée sur l’entrelacs de ses rythmes percussifs et ses timbres frottés, confiée au claveciniste Justin Taylor, qui, dans la lignée de Wanda Landowska, commanditaire et dédicataire du Concerto pour clavecin, s’illustre aussi bien dans le répertoire baroque que contemporain. Un chef-d’œuvre succède à un autre, avec les Trois Poèmes de Stéphane Mallarmé de Ravel qui voit le retour sur le plateau d’Adèle Charvet, dont le timbre grave se confond élégamment avec les modulations étranges et quasi baroques de l’ensemble instrumental (piano, quatuor à cordes, piccolo, flûte et clarinette basse) dirigé par Romain Dumas.    
 
Stravinsky aurait pu parfaire ce beau programme, mais le succès de la seconde partie n’était pas moins assuré avec, autre rareté, les trois Danses andalouses de Manuel Infante (1883-1958) pour deux pianos, par Ismaël Margain et Clément Lefebvre. Andalou de Paris – il se fixa en France en 1909 pour ne plus retourner dans son pays natal – Infante s’inspire largement du répertoire traditionnel pour composer sur près d’un quart d’heure de capiteuses Danses dédiées à la Princesse de Polignac en 1922. En conclusion, les quatre volets de la Rhapsodie espagnole magnifient ce mélange de rêverie et d’ardeur qui caractérise l’écriture de Ravel lorsqu’il évoque la danse et son Espagne adorée, surtout lorsqu’elles s’animent du feu pianistique d’un tel duo.
   Franck Mallet
• Salle Élie de Brignac, Deauville, 24 avril 2021, 20 h 30
Prochains concerts les 1er (Mahler, Grief et Schubert) et 8 (Saint-Saëns, Chabrier, Hahn et Ravel) mai, également diffusés en direct sur France 3 Normandie, facebook, RecitHall et Music.Aquarelle
Photo : Adèle Charvet et Mathilde Cadérini : ©Claude Doaré

 

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