Première nouveauté de la saison à l’Opéra Garnier : Alceste de Gluck par le tandem Marc Minkowski - Olivier Py. Un rêve pour le chef, un pensum pour le metteur en scène. A musique noble et pathétique, action minimale, tirée d’Euripide : le roi Admète va mourir, à moins qu’un de ses sujets se sacrifie à sa place. Ce sera son épouse Alceste, laquelle sera sauvée par Hercule. En acclimatant son ouvrage viennois (1767) à la scène parisienne (1776), Gluck a posé les principes de sa « réforme » : plus de folies vocales comme dans l’opéra italien, plus de ronds de jambes comme dans la tragédie lyrique française. Du naturel, du vécu, de l’émotion. Pour animer cette édifiante déploration, Py a imaginé un univers sans couleur, un Palais Garnier dessiné en temps réel sur un immense tableau noir, une coiffeuse où l’on se grime et un lit où l’on agonise, des enfants royaux qui figurent la mort et la résurrection, des sentences effacées sitôt écrites, un orchestre qui passe de la fosse au plateau (après l’entracte) en vertu du fait que « Seule la musique sauve » Une allégorie de l’opéra selon Gluck, qui meurt pour renaître plus pur et plus vrai (sentence finale : « La mort n’existe pas »), ou seulement un habillage habile d’une fable qui a moins bien franchi les siècles que celles d’Electre ou d’Antigone ? Occupés à soigner leur style sous la baguette musclée de Minkowski, les chanteurs, la superbe Sophie Koch en tête, sont démonstratifs là où on les attend sensibles. Alors, à défaut d’essuyer une larme, on étouffe un bâillement.
François Lafon
Opéra National de Paris, Palais Garnier, jusqu’au 7 octobre. En direct sur France Musique et sur les radios associées de l’Union Européenne le 28 septembre Photo © Opéra de Paris/A. Poupeney