En 1713 sont signés les traités d’Utrecht, ville de Hollande, qui mettent fin à la guerre de Succession d’Espagne : ce pays est relégué au second rang, l’Angleterre de la reine Anne Stuart réaffirme sa puissance maritime et prend possession du rocher de Gibraltar. Le prédécesseur d’Anne sur le trône de Londres, son beau-frère Guillaume III d’Orange-Nassau, disparu en 1702, militaire dans l‘âme, adversaire acharné de Louis XIV, aurait-il comme elle commandé de la musique à Haendel pour marquer l’événement ? Sans doute, mais c’était également affaire de gouvernement. Quoi qu’il en soit, le festival de La Chaise-Dieu pouvait sans chercher loin célébrer ce tricentenaire : le Te Deum (en neuf sections toutes avec choeur) et le Jubilate de Haendel sont des œuvres grandioses, créées à Saint-Paul de Londres le 7 juillet 1713, et par-dessus le marché ses premières en langue anglaise. L’excellent RIAS Kammerchor de Berlin et l’Accademia Bizantina se sont également tournés vers William Croft (1678-1727), organiste à l’abbaye de Westminster à partir de 1708 comme successeur de John Blow, fait docteur en musique à Oxford en 1713 après avoir présenté deux odes pour la paix d’Utrecht, dont With Noise of Cannon (Avec le bruit du canon) : musique moins monumentale, moins impressionnante au premier abord que celle de Haendel, mais plus attachante et plus variée. Décidément, le malheur des peuples fait le bonheur des mélomanes. De Croft, une Ode funèbre sera exécutée aux funérailles aussi bien de la reine Anne (1714) que de Haendel (1759). (à suivre)
Marc Vignal
Abbatiale Saint-Robert, 28 juin