Au Châtelet, The End, vocaloid opéra. Débuts parisiens de Hatsune Miku, seize ans, 1,58 m, 42 kg, jambes interminables et couettes bleues. Une star internationale, surnommé la « Net-Age-Diva », plus cliquée sur Internet que Lady Gaga, convaincue par le compositeur Keiichiro Shibuya de se lancer dans l’art lyrique. Histoire personnelle (la disparition de son épouse), culturelle (il a vu, en 1992, Wozzeck … au Châtelet dans la mise en scène de Patrice Chéreau), nationale (Fukushima) : Shibuya parle de la mort. Et qui peut incarner, pour un Japonais de notre temps, la femme dont on rêve, sinon Hatsune Miku (en français : « Premier son du futur »), artiste sans âme et créature parfaite puisque vocaloid (logiciel de synthèse vocale, version musicale d’humanoïde), d’autant plus vraie qu’elle est totalement virtuelle, et dont la mort prend des allures d’aventure cybernético-métaphysique ? Quatre écrans, sept projecteurs, cinquante enceintes et le compositeur lui-même aux manettes pour rendre plus présente et plus absente en même temps cette femme en 3D frappée par un virus (informatique ?), habitant un univers de manga truffé de références (avis aux fans). Salle comble, grosse couverture de presse mais trois représentations seulement : les producteurs ont-ils sous-estimé le charisme de la Miku ? Pour le néophyte : prouesse technique, invention visuelle assez bluffante (mise en scène du cinéaste YKBX), mais musique étrangement commerciale (un peu de John Adams, pas mal de Jean-Michel Jarre) et voix monocorde autant que métallique de la diva. Les initiés ont bien sûr une tout autre perception du phénomène.
Olivier Debien - François Lafon
Châtelet, Paris, 12, 13, 15 novembre.