Aux Bouffes du Nord, La Mort de Tintagiles, pièce (originellement) pour marionnettes de Maurice Maeterlinck. Pour se libérer de l’emprise, dix-huit ans après, du spectacle culte de Claude Régy (TGP de Saint-Denis, 1997), Denis Podalydès a fait appel, pour raconter le passage d’un enfant de la vie à la mort, aux musiciens Christophe Coin et Garth Knox. Bonne idée : Maeterlinck lui-même qualifiait d’opératiques ses pièces pour marionnettes, et cet ouvrage en particulier a inspiré plusieurs musiciens, dont Ralph Vaughan-Williams. A la viole d’amour et à la nickelharpa, à la basse de baryton et au violoncelle d’amour, Knox et Coin ponctuent de Bartok et de Lutoslawski, de Satie et de … Knox-Coin (improvisations) ce texte succinct et sophistiqué (Pelléas et Mélisande n’est jamais loin), précédé d’une lecture par Podalydès du magnifique Pour un Tombeau d’Anatole, adieu de Mallarmé à son fils disparu. Le souvenir de Régy n’est pas pour autant conjuré. On le retrouve dans la lenteur des mouvements, dans l’éclairage minimal. Mais alors que chez Régy les mots et les corps semblaient flotter dans un espace infini, chez Podalydès le jeu psychologique des acteurs (par ailleurs fort bons) est d’autant moins sauvé par le halo d’au-delà des cordes vibrant « par sympathie » que, cédant à une mode qui fait actuellement fureur, voix et musiques sont sonorisées et retravaillées façon showbiz, ce qui ne va pas vraiment avec le sujet.
François Lafon
Bouffes du Nord (Paris) jusqu’au 28 mai. Du 5 au 7 novembre au Trident (Cherbourg), le 19 janvier 2016 à l’Espace Legendre (Compiègne) Photo © Pascal Gély