Mardi 19 mars 2024
Concerts & dépendances
Premier concert de la série « Musique de chambre » à l’Athénée par l’ensemble en résidence Le Balcon, portique d’entrée de la copieuse prochaine saison (cent-soixante-quatre levers de rideaux, onze créations, dont cinq spectacles musicaux, trois opéras et six concert) présentée et commentée par le directeur Patrice Martinet. Programme exigeant - Boulez et Messiaen - mais façon Balcon, c’est-à-dire « élitaire pour tous » (Antoine Vitez). Un voyage à rebours, commençant par l’abstrait Anthème II pour violon et électronique (1994), extension d’une pièce pour violon seul commandée à Boulez par le Concours Yehudi Menuhin. Performance de You-Jung Han (violon) et d’Augustin Muller (informatique), musique lyrique et cristalline, échos lointains et miroirs brisés, volées de notes et mélodies suspendues, stade ultime de la dynamique lancée cinquante-trois ans plus tôt par le Quatuor pour la fin du temps au stalag VIII-A de Görlitz où était détenu Messiaen, futur maître de Boulez. Pléthore d’images imaginée par le vidéaste Nieto pour cette œuvre à la fois singulière et fondatrice : vidéos sur tulles, vitraux et bandes dessinées, oiseaux et démons, habillant les très jeunes et formidables instrumentistes en chemise (de nuit, pour le rêve ? de grand-père, pour la guerre ?), embrasant les tutti durs et portant aux nues les solos tendres, jusqu’au kitsch assumé de l’agneau au cœur flamboyant accompagnant la « Louange à l’Immortalité de Jésus ». Salle pleine, ovation finale. Projet de fondation en vue pour éviter à l’Athénée, théâtre public depuis 1982 et creuset de création unique en son genre, de tomber un jour aux mains d’un investisseur privé. Un chantier prioritaire pour la nouvelle et très fêtée ministre de la Culture ? 
François Lafon

jeudi 18 mai 2017 à 00h18
A l’Athénée, suite (Phèdre) et fin (Ajax) de la Trilogie des éléments (un par semaine) selon Yannis Ritsos (poète), Enrico Bagnoli (metteur en scène) et Marianne Pousseur (interprète). Après Ismène (voir ici), spectacle fondateur, un  apparent assagissement : traitement musical de Marianne Pousseur elle-même, succédant à Georges Aperghis, grand spécialiste de la musicalisation textuelle (et de la textualisation musicale), environnement visuel tout aussi raffiné mais moins inventif. Véhémence égale cependant : dans la peau - ou en porte-parole - de Phèdre (le feu), et d’Ajax (l’air), l’interprète sollicite moins ses extraordinaires possibilités vocales, mais n’en transmet que mieux le génie de Ritsos, quotidien et mythique, victime des dictatures modernes (Metaxas, les Colonels) retrouvant du fond de sa prison l’inspiration des grands anciens. Superbe continuité aussi, le drame d’Ajax, héros de la force primaire distancé – une révolution dans l’histoire de la civilisation - par l’habileté d’Ulysse, rejoignant ceux, immémoriaux, d’Ismène et de Phèdre, télescopant temps mythiques et temps modernes en un raccourci virtuose. Belles interventions musicales enfin, rendant hommage à Aperghis autant qu’à Mikis Theodorakis - ami, inspirateur et compagnon politique de Ristos -, le tout mis en espace avec un soin tout ircamien. Orage homérique ce soir de première, transformant la cage de scène en instrument à percussion avec une remarquable justesse musicale : « La tragédie, c’est l’histoire de larmes », aimait à rappeler Antoine Vitez.
François Lafon

Théâtre de l’Athénée, Paris, jusqu’au 20 mai (Photo © DR)
jeudi 4 mai 2017 à 10h56
Au Théâtre de l’Athénée : Ismène, premier volet de la Trilogie des éléments, trois solos sur des textes de Yannis Ristos par la chanteuse-actrice-performeuse Marianne Pousseur (fille du compositeur Henri Pousseur), mise en scène par Enrico Bagnoli. Une histoire qui remonte loin, à la découverte en France de Ritsos (1909-1990), poète inspiré, engagé et emprisonné, par Antoine Vitez (Electre de Sophocle, « parenthèses » de Ristos – 1971). En 2008, c’est Georges Aperghis, collaborateur de longue date de Vitez et déjà auteur, pour Marianne Pousseur, d'une Clytemnestre (Dark Side - 2003), qui musicalise cette Ismène déjà vue à Paris en 1976 avec Judith Magre (sans musique, mais avec des « parenthèses » … d’Aragon). Aujourd’hui, l’objet est culte et a beaucoup tourné : dans un espace visuel et sonore à la fois bricolé et sophistiqué dû à Diederick de Cock et Guy Cassiers, Ismène, discrète fille d’Œdipe et sœur d’Antigone, a l’eau pour élément (le plateau est un bassin, source d’étonnants effets visuels). Statue nue et minérale, antique et pataugeante, parlant en français d’un timbre de miel et déployant en grec (un grec ancien et barbare, recomposé par Aperghis) ses incroyables ressources vocales, Marianne Pousseur incarne rien moins que la tragédie. Perte de repères garantie, vertige visuel et auditif : une manière d’approcher le mythe. Suite(s) de la Trilogie courant mai avec Phèdre (le feu) et Ajax (l’air), où Pousseur elle-même succède à Aperghis pour la musique.
François Lafon

Théâtre de l’Athénée, Paris, jusqu’au 6 mai. Phèdre du 10 au 13 mai, Ajax du 17 au 20 mai (Photo © DR)

 

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