Vendredi 29 mars 2024
Intérieur hollandais
Tout (et plus) ce que Haitink a fait à Amsterdam
Concertgebouworkest - Complete Studio Recordings

Dans le genre gros coffret, ce n’est un qu’on attendait avec impatience : un an à peine après la mort du chef, voici tous les enregistrements « studio » de Bernard Haitink (1929 - 2021) et le Concertgebouw d’Amsterdam, une paire qui n’a quasiment jamais cessé d’enregistrer depuis le moment où le tout jeune chef à pris les commandes de l’orchestre en 1961 jusqu’à son départ plus d’un quart de siècle après. Presque tout ce qui y est contenu avait été réédité maintes fois, mais retrouver ce legs (114 CD et 4 DVD) dans une seule boîte est le rappel d’une certaine âge d’or du classique (quelle maison de disques pourrait se permettre aujourd’hui de prendre le Concertgebouw plusieurs jours pour une symphonie de Mahler ?) dont Haitink a su très bien profiter pour une moisson d’interprétations de légende. Le titre du coffret est d’ailleurs trompeur, car si tous les enregistrements studio de Haitink à Amsterdam sont bien repris (y compris ceux pour EMI et Sony) on y trouve aussi l’intégrale Chostakovitch dont quelques volets avec le Philharmonique de Londres et les live réalisés en plein été indien du chef pour le label maison RCO Live, dans un louable effort éditorial. Si l’on prend les choses chronologiquement, on pourra apprécier l’évolution d’un orchestre qui dans les années 60 gardait encore une sonorité bien particulière (et un peu standardisée depuis), captée par les micros de Philips, qui fait merveille surtout dans les symphonies de Mahler, spécialité locale : cette première intégrale n’a pas pris une ride, et si le cycle est d’une parfaite homogénéité, la 3ème et la 7ème (celle-ci en deux versions superbement crépusculaires) sont toujours épatantes. Sonorités aussi uniques dans Debussy et Ravel, exploitées d’une main de maître par Haitink avec un art superbe du sfumato. L’intégrale Bruckner a vieilli moins bien (il fera mieux à Vienne plus tard dans certaines symphonies), tandis que la Beethoven, mal aimée de la critique, mérite mieux à la réentendre que ce qu’on a écrit. Le cycle Brahms, lui, continue de faire l’unanimité, ne serait-ce que par la beauté du son. Les concertos sont bien plus qu’un complément : accompagnateur caméléon, Haitink était le partenaire idéal, lui qui savait aussi bien enrober avec opulence le piano XXL de Claudio Arrau  (le 2ème de Brahms !) que suivre d’un pas léger le félin Murray Perahia dans Beethoven. Et si tout n’est pas du même niveau, difficile d’être déçu par un musicien à la probité exemplaire et d’une grandeur qu’on lui a souvent nié. Il faut espérer que ses enregistrements ailleurs (Londres, Vienne, Berlin, Boston... ) soient également repris avec la même exhaustivité. 

Pablo Galonce


Œuvres d’Andriessen, Bartók, Beethoven, Berlioz, Bizet, Bloch, Brahms, Britten, Bruch, Bruckner, Chabrier, Chostakovitch, Debussy, Dvořák, Glinka, Handel, Haydn, Kodály, Mahler, Mendelssohn, Messiaen, Moussorgski, Prokofiev, Rachmaninov, Ravel, Saint-Saëns, Schubert, Schumann, Smetana, Strauss, Stravinsky, Takemitsu, Tchaïkovski, Verdi et Wagner
Claudio Arrau, Vladimir Ashkenazy, Alfred Brendel, Murray Perahia (piano), Arthur Grumiaux, Herman Krebbers, Itzhak Perlman, Henryk Szeryng (violon), Janos Starker, Mstislav Rostropovich (violoncelle)
Royal Concertgebouw Orchestra, London Philharmonic Orchestra
Direction musicale : Bernard Haitink
113 CD + 4 DVD Decca 4852737

mis en ligne le lundi 8 mai 2023

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