En deux week-ends, la septième édition tourangelle des Concerts d’Automne se poursuivait avec le baroque portugais grâce à
Divino Sospiro et son chef Massimo Mazzeo – un ensemble fondé en 2004 d’autant plus actif qu’il est à l’origine de la création du Centre d’étude musicale du XVIIIème siècle du Portugal, logé au Palais de Queluz, près de Lisbonne. Soutenu en France dans le cadre de la saison France-Portugal 2022 sous la houlette de l’Institut français/Commissions de la Culture du Portugal, Divino Spirito concluait la manifestation à Tours. Si, pour beaucoup, le répertoire de cette époque demeure une découverte, le chef d’orchestre expliquait en début de concert les « richesses cachées » d’œuvres et de compositeurs comme Almeida, Seixas ou Carvalho, témoins d’échanges avec l’Italie et l’Espagne ; l’ambition de la formation étant de réhabiliter des opéras et des sérénades de compositeurs commandés par la famille royale. Après l’oratorio
La morte d’Abel de Pedro António Avondano (1714-1782) – sur un livret de Métastase – donné avec succès en février dernier à Metz, le choix se portait à Tours sur des extraits d’ouvrages soigneusement préparés en amont avec Alessandro Di Profio, directeur fondateur des Concerts d’Automne :
Perseo de Joao de Sousa Carvalho,
L’isola disabitata de David Perez,
Antigono d’Antonio Maria Mazzoni et
La morte d’Abel. La soirée débutait sur les chapeaux de roue avec l’Ouverture d’
Antigone, dont la fièvre était restituée avec entrain par Divino Sospiro. L’atmosphère change imperceptiblement avec
Ana Quintans (née à Lisbonne!) dans
Questi al cor finora ignori de
La mort d’Abel, air magnifique où il s’agit d’apprécier le soprano intense de la chanteuse et sa propension à faire rejaillir en quelques secondes l’émotion d’une partition jusque-là inconnue. Bruno de Sá est l’autre vedette de la soirée, nouvelle célébrité au sein du monde des contre-ténors, distingué aussi bien dans Bach (
St Jean) que dans Mozart (Cherubino des
Noces) ou John Adams (
El Niño). Un timbre ambigu – lui-même préfère le terme de « sopraniste » qui, certes, caractérise mieux une étendue vocale qui passe sans effort du pianissimo au forte –, ce qui lui permet d’aborder de nombreux répertoires avec un naturel troublant. Seul dans un air de
Persée ou en duo avec Ana Quintans dans
L’Isola disabitata, sa voix apparaît d’une grande souplesse, même si parfois le haut médium n’est guère étoffé – mais le chanteur est encore jeune… Aussi à l’aise sur scène que sa complice, ils se retrouvèrent ensuite dans une sélection de chansons – « Modhinhas e Canzoncine » – signées Marcos António Portugal, Candido Inácio da Silva, Giuseppe Totti et José Palomino y Quintana, transcrites et orchestrées par Capela, Ribeiro, Carrilho et Mazzeo. Un style plus léger que la « Musique pour le roi » de la première partie, mais où les deux solistes brillèrent avec un succès égal. Une redécouverte méritée grâce aux Concerts d’Automne.
Photo : Ana Quintans, Bruno de Sá et Divino Sospiro.