Mercredi 8 mai 2024
Entre myopie et presbytie
Une vision déconcertante de Moussorgski et Ravel
Kaleïdoscope

Si la technique de l’interprète est irréprochable (Ballet des poussins dans leurs coq, Limoges !) – tout comme celle de son coiffeur, au vu de la pochette –, que voici d’étranges Tableaux d’une exposition, aux tempi volontairement ralentis et à la dynamique étouffée (Promenade I & II, Le vieux château, Catacombes), quand les touches ne sont pas appuyées exagérément : Tuileries, Bydlo, La cabane sur des pattes de poule… Comme s’il fallait rendre aphone ce chef d’œuvre pianistique, tout en lui imposant une interprétation radicale et neuve – sinon, pourquoi faire carillonner d’une manière aussi grinçante Samuel Goldenberg ? Trop de gesticulations et d’effets de manche chez Khatia Buniatishvili ; préférons-lui d’authentiques poètes – et ils sont nombreux : Yudina, Richter, Pogorelich, Afanasiev, Janis, Ugorsky, Ashkenazy… Sensation d’étouffement avec La valse de Ravel qui, dans son intention première d’amour-répulsion doit certes tanguer et faire chavirer, mais jusqu’où ? Affaire de goût, ici. Dans cette version pour piano seul, la plus rare, comparée à celles pour orchestre et pour 2 pianos, on boit la tasse et coule à pic. Seule réussite de cet album, les Trois mouvements du ballet Petrouchka de Stravinsky qui chantent et dansent à tue-tête, tant la pianiste joue avec maestria du rythme et de la couleur, pour une vision « à l’opposé de l’interprétation percussive » comme elle le reconnaît avec à-propos dans les notes de pochette ; désormais une référence.
Franck Mallet

Moussorgki : Tableaux d'une exposition - Ravel : La valse - Stravinsky : Trois mouvements de Petrouchka
Khatia Buniatishvili (piano)
1 CD Sony Classical 88875170032
1 h 01 min

mis en ligne le dimanche 27 mars 2016

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