Samedi 20 avril 2024
Festival d’Aix-en-Provence 2
Wagner, part du rêve et open space
Tristan und Isolde

Des bourgeois en pleine crise de la cinquantaine se rêvent une passion mythique. Bien trouvé pour mettre en situation des chanteurs qui fréquentent leurs rôles depuis plusieurs décennies. Mais si Tristan et Isolde n’est qu’une affaire de démon de midi, qu’est Hamlet sinon un thriller au dénouement prévisible ? Qui seraient et comment agiraient les Tristan et Isolde de notre temps, s’est demandé le metteur en scène Simon Stone, à qui l’on doit une Traviata à l’ère des réseaux sociaux à l’Opéra de Paris (voir ici). Le couple qui égrène son duo d’amour (et revit sa vie par doubles interposés) dans un open space de start-up (acte 2) ? Qu’est son histoire, qui se termine dans le métro parisien (ligne 11), d’où Isolde sort (vivante et en robe du soir) au bras du (jeune) traître Melot (son fils?). Fin du drame bourgeois ? Pourquoi pas, s’il n’y avait cette satanée musique, laquelle en a vu bien d’autres si ce n’est qu’elle est porteuse d’images et de souvenirs et que parmi les nombreux produits du Regietheater qui courent les scènes, celui-ci ne rapproche ni n’éloigne l’œuvre de nous, ne l’éclaire ni ne la révèle, obligé en fin de compte de « raconter l’histoire » à défaut de la réécrire complètement. Beau spectacle au demeurant, avec projections (justifiées) et direction d’acteurs (presque) comme au cinéma, empêchant autant que faire se peut les chanteurs de jouer comme… des chanteurs. Heureusement ils chantent glorieusement, "à l'ancienne" pourrait-on dire, surhumains dans ce spectacle qui craint tant l’emphase, voix infatigables du couple-vedette Nina Stemme - Stuart Skelton, émotion de Franz-Josef Selig en roi Marke-homme - d’affaires et de Josef Wagner en Kurwenal, dangereusement sympathique Jamie Barton en Brangäne. Dans la fosse, le London Symphony dont on a craint - le Brexit s’ajoutant au Covid - qu’il ne puisse traverser le Channel donne  de belles couleurs, galvanisé par Simon Rattle de retour dans ce théâtre (presque) construit pour lui et « son » Wagner (La Tétralogie 2006-2009). Yeux fermés, yeux ouverts, leur Tristan est convaincant. 
François Lafon

Aix-en-Provence, Grand Théâtre de Provence, jusqu’au 15 juillet – En replay sur Arte Concert jusqu’au 30 août 2023 - Diffusion ultérieure sur Arte télévision (Photo © Jean-Louis Fenandez)


Tristan und Isolde
Nina Stemme, Stuart Kelton, Josef Wagner, Franz-Josef Selig, Jamie Barton, Dominic Sedgwick, Ivan Thirion
London Symphony Orchestra, Estonian Philharmonic Chamber Choir
Direction musicale : Simon Rattle
Mise en scène : Simon Stone

mis en ligne le lundi 12 juillet 2021

Bookmark and Share
Contact et mentions légales.
Si vous souhaitez être informé des nouveautés de Musikzen laissez votre adresse mail
De A comme Albéniz à Z comme Zimerman,
deux ou trois choses et quelques CD pour connaître.