Jeudi 28 mars 2024
Le cabinet de curiosités par François Lafon
Un graphomane appelé Beethoven
lundi 24 janvier 2011 à 16h06

Encore une intégrale de Beethoven : pas celle de ses œuvres, mais de ses lettres. Actes Sud reprend en fac-similé une traduction française de 1968 (mais jamais rééditée) de la correspondance du compositeur. Une somme un peu intimidante : qui, outre les passionnés ou les chercheurs, a envie de plonger dans ces centaines de pages ? D’autant que Beethoven n’avait pas ce qu’on peut appeler un beau style. Parfois les missives ont la concision d’un SMS (surtout quand il s’agit de demander quelque chose à Ferdinand Ries ou Anton Schindler, ses collaborateurs les plus proches), parfois elles prennent un air plus pompeux pour s’adresser à l’un de ces mécènes qui l’ont soutenu parmi l’aristocratie viennoise. Mais si une à une ces lettres sont rarement passionnantes (Beethoven se faisait mieux comprendre avec les notes qu’avec les mots), l’ensemble donne une idée du métier de compositeur dans la Vienne du début XIXème siècle et de la lutte qu’il a du mener chaque jour : il réserve ses meilleurs compliments et insultes pour ses éditeurs (tour à tour extraordinairement dévoués ou ineptes), se préoccupe du manque de copistes « qui connaissent bien [son] écriture », et les erreurs dans les éditions le mettent hors de lui. Sa personnalité se dessine aussi dans ces documents. Pas mal égocentrique, il lui arrive de parler de lui-même à la troisième personne (« Beethoven ne jette pas de la poudre aux yeux et n’a que dédain pour tout ce qu’il n’obtient pas directement de son art et de son talent. ») et n’arrête pas de se plaindre de ses maux de tête, de ses diarrhées... Pas une lettre qui ne soit aussi un bulletin de santé, avec une attention particulière aux progrès de sa surdité à partir du fameux Testament de Heiligenstadt où le compositeur avoue son malheur. D’autres documents célèbres (la « Lettre à l’Immortelle Bien Aimée », par exemple) se fondent dans cet épais ouvrage qui recueille 1750 lettres. Trop ? Une suggestion : les lire en écoutant en parallèle chronologique les œuvres de Luwig van B.

Pablo Galonce

 

Les Lettres de Beethoven. L’intégrale de la correspondance 1787-1827. Actes Sud, 1746 pages, 49 euros. 

 

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