L’opéra au cinéma, en HD et en direct, est une affaire qui marche : salles chauffées à blanc et premières loges pour tout le monde. Mais le concert ? Plan d’ensemble sur les violons en nage, close up sur le rictus du clarinettiste, contreplongée sur le chef gesticulant. A la télévision ou sur votre ordinateur, le spectacle n’est pas toujours glamour. Alors sur écran géant ! C’est pourtant ce que vont tenter deux orchestres, et non des moindres : le Philharmonique de Berlin et l’Orchestre de Philadelphie. Ce dernier voit grand : neuf programmes de la saison 2010 - 2011 diffusés dans cinquante-cinq cinémas de Pennsylvanie, de Floride, du Texas, de Californie, de l’Illinois et du Wisconsin. La démarche de Berlin n’est pas moins conquérante : dans soixante salles de onze pays d’Europe, les mélomanes vont, le 27 août à 18h45, voir en entendre en direct de la Philharmonie la 4ème Symphonie de Beethoven et la « Titan » de Mahler. En Allemagne, certaines salles affichent entrée libre. Au Royaume-Uni, la presse bat tambour : c’est Sir Simon Rattle qui est au pupitre, et apparemment, cela commence à bien faire que les Allemands aient le quasi-monopole du plus illustre (avec les Beatles) des natifs de Liverpool. Plus fort encore : Rising Alternative, le distributeur, annonce l’intégrale des Symphonies de Mahler que Sir Simon a programmée à Berlin pour commémorer à la fois le 150ème anniversaire de la naissance du compositeur (7 juillet 2010) et le centenaire de sa mort (18 mai 2011). Mais à quoi vont servir les valeureux orchestres régionaux, qui jouent Mahler comme tout un chacun (l’épidémie fait rage par les temps qui courent), si le Philharmonique de Berlin vient chasser sur leurs terres, relayé par la technique moderne ? En France, la question ne se pose pas : faute d’accords avec l’orchestre, le concert ne sera pas diffusé.
François Lafon