Qui eût cru que la star de la Coupe du monde de football serait un instrument de musique ? Le problème, c’est que c’en est aussi la bête noire. La vuvuzela, petit clairon sud-africain émettant un son approchant les cent-trente décibels, feraient passer les habituelles cornes de brume pour des instruments célestes. Sur le terrain, cela déconcentre les joueurs, les empêche de communiquer entre eux. «Avec les vuvuzelas, on n'entend rien. C'est impossible. On ne communique que par gestes», se plaint Yoann Gourcuff. Cristiano Ronaldo est plus philosophe : « Ca ne plait à presque personne, mais ça va avec les gens qui aiment souffler dedans et faire du bruit ». En Suisse, le fabricant de prothèses auditives Phonak diffuse une étude selon laquelle « l’exposition prolongée à quatre-vingt-cinq décibels peut provoquer une perte auditive. Quand le son est supérieur à cent décibels, la perte peut se produire en à peine quinze minutes ». Un spécialiste anglais de l’hygiène tropicale prévient de son côté que les vuvuzelas peuvent favoriser la propagation de microbes, « car beaucoup de souffle passe dedans ». Dès les premiers matchs, les centraux téléphoniques des chaînes de télévision ont explosé : « Qu’est-ce que c’est que ce bourdonnement insupportable ? ». Une vuvuzuela barrée dans un cercle rouge fleurit sur Internet. Ultime nuisance de l’objet, le cri du cœur, sur un forum de Libération, d’un footeux mélomane : « C’est pénible, certes, mais nettement moins que les oeuvres de Pierre Boulez ».
François Lafon