Les Argentins peuvent être fiers. Après trois années de travaux (commentées dans un riche site en espagnol), le Teatro Colón de Buenos Aires a rouvert ses portes ce 24 mai. Cela tombe à pic : l’Argentine fête ces jours-ci le bicentenaire de la révolution qui a conduit à son indépendance. Deux siècles après, le pays continue à se mesurer au Vieux Continent, comme on le voit dans les commentaires de la presse : « Un travail d’un niveau qui même en Europe serait impensable, » dit une architecte à propos de cette restauration. Il est vrai que rendre son lustre à cette vieille dame (102 ans, tout de même) n’a pas été une mince affaire. A la fin des années 1980, on était allé jusqu’à supprimer le système anti-incendie, et la vétusté des équipements était manifeste. Il fallait que ce bâtiment de 60.000 mètres carrés retrouve son aspect délicieusement éclectique, tout en préservant une acoustique considérée comme l’une des meilleures du monde : ce dernier point est un motif (légitime) de fierté patriotique.
Pour des raisons politiques, la présidente de la République, Cristina Fernández de Kirchner a boycotté la fête. Les invités de marque de cette réouverture (ils étaient 2487, si toutes les places étaient occupées) ont assisté au troisième acte du Lac des cygnes puis au deuxième de la Bohème. La fête finie et l’exaltation nationale retombée, le plus difficile reste à faire. Le Colón est certes une merveille architecturale, mais il y a encore du travail avant qu’il ne retrouve le prestige et les distributions qui pendant quelques décennies ont fait de lui l’une des grandes scènes lyriques au monde.
Pablo Galonce