C’est une tendance pas encore lourde, mais tout de même un virage à 180° en ces temps de dématérialisation du disque, du livre, de la presse : le vinyle classique est de retour. Cela fait un moment que dans leur domaine, les DJ s’y sont mis : pour mixer, le 33 tours est de mise. Mais cette fois, ce sont des chefs comme Gustavo Dudamel et Paavo Järvi qui entonnent le péan du son analogique et du diamant labourant les sillons. Sur son blog Slipped Disc, Norman Lebrecht s’en fait l’ambassadeur. Premières parutions : la Symphonie « Ecossaise » de Mendelssohn avec le Philharmonique de Vienne par le premier (DG), l’intégrale des Symphonies de Beethoven (déjà sorties en CD) avec la Deutsche Kammerphilharmonie Bremen par le second (RCA), accompagnées des qualificatifs d’usage : couleur, chaleur, charme, harmoniques riches, dynamique englobante, brillance radieuse. Tout ce qui manque au son numérique, selon les nostalgiques du LP, lesquels ont commencé à batailler dès la sortie des premiers CD au début des années 1980. Cette fois, ce sont des artistes nés après la disgrâce dudit LP qui montent au créneau. Iront-ils jusqu’à prétendre, comme certains audiophiles, que le signal numérique étant discontinu, il est incapable de reproduire le legato d’un violon ? « Seul les meilleurs lecteurs SACD (s’il y en a) peuvent produire un son aussi coloré », s’enthousiasme Lebrecht. Allons-nous ressortir nos vieilles platines et nos chiffons antistatiques, retrouver les délices des « cloc » et des « scratch », racheter régulièrement nos disques gondolés ou/et usés jusqu’à la trame, remonter nos étagères au format 30cm ? Les Beethoven par Järvi n’ont été pressés qu’en édition limitée de 999 exemplaires, destinée aux vrais mélomanes. Ouf ! Pas encore morts, nos MP3.
François Lafon