Au Théâtre des Champs-Elysées, récital de Yo Yo Ma avec Kathryn Stott au piano. Programme cassant savamment les codes, dans la lignée de son Silk Road Project, « organisation d’art et d’éducation à but non lucratif ». Première partie latino-russe, enchaînant sans respirer des transcriptions pour violoncelle de Villa-Lobos, Piazzolla et Camargo Guarnieri dans la foulée de la Suite italienne de Stravinsky, elle-même transcrite pour violoncelle et piano de la suite d’orchestre Pulcinella. Phrasés généreux, sonorités miroitantes, énergie inépuisable de Ma, jonglant avec ces univers proches et complémentaires. Seconde partie plus sérieuse, sans hiatus pourtant avec la première : chant infini, archet interminable dans la "Louange à l’éternité de Jésus", extraite du Quatuor pour la fin du temps de Messiaen, fabuleuse richesse expressive de la 3ème Sonate de Brahms, où l’on aurait aimé un engagement plus net de l’impeccable Kathryn Schrott, partout ailleurs efficace accompagnatrice. Série de bis se terminant par un ineffable Cygne de Saint-Saëns, danse improvisée de l’artiste déchaîné en guise de salut. Spectateurs très jeunes, particulièrement enthousiastes dans les loges du dernier balcon : beaucoup de violoncellistes en herbe certainement, qui n’auraient pas manqué une telle leçon pour un empire.
François Lafon
Théâtre des Champs-Elysées, Paris, 23 avril Photo © DR