Débuts de l’Ensemble Intercontemporain, pensionnaire de longue date de la Philharmonie 2 (ex-Cité de la Musique) dans la grande salle de la Philharmonie de Paris. Programme XXL, en collaboration avec les jeunes instrumentistes de l’Orchestre du Conservatoire : Pli selon pli (portrait de Mallarmé) de Pierre Boulez et Amériques d’Edgar Varèse. Un double test - du murmure à la déflagration -, pour apprécier l’acoustique du lieu, si l’on ne savait que les réglages définitifs sont encore à faire. Tel quel, entendu du premier balcon jardin (juste au-dessus de l’orchestre), le son est clair, mais aléatoire, et différent d’une place à l’autre. L’extraordinaire jeu de timbres de Pli selon pli se déploie, somptueux et soyeux, mais la voix trop lointaine de la soprano Marisol Montalvo (vue et entendu de dos) a du mal à évoquer l’au-delà du poème (« Si vous voulez comprendre le texte, alors lisez-le ») recherché par Boulez. Avec Amériques, géniale Symphonie du Nouveau Monde de l’ère industrielle, l’alliage Conservatoire-Intercontemporain continue de jeter des étincelles, même si le chef Matthias Pintscher, précis et véhément mais respirant moins naturellement cette musique saturée de rythmes et de couleurs que celle, à la fois dense et raréfiée, de Boulez, ne parvient pas jusqu’à la dimension panique (un Sacre du Printemps explosé) trouvée par Esa-Pekka Salonen en 2011 au Châtelet (festival Présences). Salle pleine, public plutôt jeune : curiosité pour la nouvelle salle ou, déjà, succès du pari Philharmonie ?
François Lafon
Philharmonie de Paris, grande salle, 3 février Photo Marisol Montalvo © DR