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Concerts & dépendances
Opéra de Paris 1 : Les Huguenots, le retour
samedi 29 septembre 2018 à 00h57
Rentrée contrastée à l’Opéra de Paris : Les Huguenots de Meyerbeer et Bérénice de Michael Jarrell, une résurrection et une création.  Donné 1118 fois en un siècle (1836-1936), détrôné seulement par le Faust de Gounod, Les Huguenots ne reparaît qu’aujourd’hui dans sa maison-mère, longtemps victime de la « malédiction Meyerbeer » - celui-ci aussi négligé qu’il a été adulé, traité de bon faiseur, au mieux d’inspirateur de génies (Verdi, Wagner, Moussorgski même) influencés par le grand opéra à la française dont il a été le champion durant la monarchie de Juillet. A écouter ces quatre heures de musique (on nous épargne le ballet) aussi éclectique qu’inventive, à suive ce mélodrame dont la Saint-Barthélémy n’est pas que la toile de fond (Scribe, le librettiste, nous ferait presque croire que ce sont les amours contrariées de son héros Raoul de Nangis qui ont déclenché le massacre), on se demande quel sortilège s’est rompu, pourquoi l’on est tenté de ne voir que des ficelles là où nos ancêtres voyaient la vérité même : « La scène se passe devant vous et en vous (…) Quant aux moyens, personne n’y songe », résumait Théophile Gautier. En 1990, pour l’ouverture du Corum de Montpellier, l’intrigue était transposée dans l’Irlande de l’IRA. Ici, le metteur en scène allemand Andreas Kriegenburg a évité le piège : « La mode, la politique, mais aussi l’horreur et l’épouvante semblent condamnées à se répéter », observe-t-il. Exeunt les fastes historicisants dudit grand opéra, au profit d’une démonstration un peu froide, formant contraste avec le too much audio et visuel caractéristique du genre : un fond blanc et des costumes colorés, d’époque mais stylisés, évoquent « un laboratoire dans lequel les humains sont davantage présents ». Distribution sans superstar (Diana Damrau a annulé), pas indigne cependant des « sept étoiles » requises autour du ténor Yosep Kang (Bryan Hymel a annulé aussi) - suraigu pas toujours assuré, mais beau style et payante conviction. Gros succès pour l’Américaine Lisette Oropesa (la remplaçante de Damrau) en future reine Margot vocalisante, pour Ermonela Jaho en amoureuse aux moyens plus dramatiques (une « Falcon » en jargon de chanteurs), pour Karine Deshayes en page épisodique, pour des « clés de fa » sans faille, dont les excellents Paul Gay (pourquoi l’entend-on si rarement ?) et Florian Sempey ainsi que pour les chœurs, fortement sollicités. Au pupitre, Michele Mariotti gère supérieurement le temps meyerbeerien, saturé d’événements en même temps qu’étiré à l’extrême.
François Lafon 

Opéra National de Paris - Bastille, jusqu'au 24 octobre. En direct au cinéma et sur Culturebox le 4 octobre. En différé sur France Musique le 21 octobre à 20h et sur France 3 ultérieurement (Photo © DR)
 
 

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