Mardi 23 avril 2024
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Opéra Comique : Fidelio en  vidéo surveillance
mardi 28 septembre 2021 à 00h14
A l’Opéra Comique : Fidelio de Beethoven mis en scène par Cyril Teste et dirigé par Raphaël Pichon. Avec le premier, on s’attend à de la vidéo en direct : on l’a. Avec le second, à un retour aux premières versions de l’ouvrage, plus proches de Mozart : on ne l’a pas, le mélange des moutures s’étant avéré stylistiquement et dramatiquement tiré par les cheveux. C’est donc l’habituel Fidelio dernière manière (1814) que nous entendons, mais joué par l’Orchestre Pygmalion (instruments historiques) et dans un esprit de chambre justifié par la taille des théâtres de l’époque, plus proches de la salle Favart que de l’Opéra Bastille. Comme au théâtre (sa Mouette de Tchékhov alimente la chronique) et déjà à l’Opéra Comique avec Hamlet d’Ambroise Thomas, Teste fait donc éclater l’unicité des sources et travailler l’œil du spectateur. Problème qui tendrait à faire croire que le hasard est un coquin : la soprano Siobhan Stagg, physiquement crédible en Fidelio/Leonore travesti, est tombée aphone le jour de la première. Qu’à cela ne tienne, une doublure chante dans la fosse – samedi 25 Katherine Broderick, aujourd’hui Jacquelyn Wagner, formidables toutes les deux - pendant que la dame mime son rôle. Gênant ? Non, éclairant, d’autant que Mrs Stagg peut assurer les passages parlés, réduits au minimum et finement sonorisés pour ne pas rompre l’atmosphère. Que dire, sinon, du spectacle ? Que pour ne pas être une nouveauté (depuis la mise en scène de Jorge Lavelli à Toulouse en… 1977) la transposition contemporaine, dans une prison ripolinée prenant le contrepied de la tradition « cul de basse fosse suintant », passe bien sans chercher (ce qui est sage) à unifier les divers tons et styles (singspiel, grand mélo, oratorio final) ni les divers thèmes dramaturgiques (liberté, justice,  condition féminine) lesquels se heurtent de toute façon à l’optimiste final de l’ouvrage, si éloigné du sombre relativisme de notre époque. Enthousiasme pourtant d’une salle bondée applaudissant la double Leonore, le vétéran Albert Dohmen (Rocco), la fraîche Mari Eriksmoen (Marzelline) et l’élégant Christian Immler (Don Fernando), et réservant une ovation au décidément phénoménal Michael Spyres, le premier Florestan peut-être – avec des moyens opposés – à tenir tête au souvenir de Jon Vickers, tant les « moutons à cinq pattes » (super-héros de l’opéra selon Régine Crespin) sont rares sur les scènes actuelles. En sortant de sa zone de confort baroque, Raphaël Pichon gagne du galon, en dépit des rugosités de son orchestre.
François Lafon
Opéra Comique, Paris, jusqu’au 3 octobre. Diffusion sur Arte Concert le 1er octobre (Photo © Stefan Brion)

A propos de super-héros, ne pas manquer la journée (colloque, masterclass, concert) consacrée le 6 octobre à l’Opéra Comique par le Centre Européen de Musique à la légendaire Pauline Viardot, dont Berlioz écrivait qu’en Leonore de Fidelio, « elle tenait toute la salle haletante sous le feu de son regard, par la véhémence de sa voix, l’énergie menaçante de son attitude ».

 

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