Cette année au festival Berlioz de la Côte-Saint-André : "Sur les routes Napoléon". Pluriel signifiant : deux siècles exactement après le retour de l'île d'Elbe, c'est sur nombre de chemins que se croisent le musicen et le meneur d'hommes, tous deux victimes du destin, tous deux loosers gagnants au regard de l'Histoire. Onze jours de festivités, cinquante manifestations, mille musiciens mobilisés. Etapes musicales le long de la route Napoléon, avec bivouac, défilé en costumes et banquet impérial, Te Deum (de Berlioz) monstre au théâtre antique de Vienne : l'ouverture est la hauteur de l'ambition du directeur Bruno Messina, artisan de l'impressionnante montée en puissance d'une manifestation qui s'est longtemps cherchée. Pour preuve le concert Rois et reines, dans l'église monumentale de Saint-Antoine l'Abbaye, en plein Vercors. Autour de le Méditation religieuse extraite du triptyque Trista, où Berlioz met en garde les puissants contre les mirages de la gloire, le chef Hervé Niquet, jouant comme toujours la carte de l'enthousiasme à la tête du Concert Spirituel, confronte les Restaurations : Retour des cendres avec la pré-verdienne Marche funèbre d'Auber pour les funérailles de Napoléon, Messe des morts commandée par Louis XVIII à Charles-Henri Plantade pour commémorer le décès de Marie-Antoinette, Requiem de Cherubini pour le transfert à Saint-Denis des dépouilles royales. Etranges télescopages temporels : classicisme et romantisme, mélodrame et retenue, concessions et hardiesse, cuivres d'outre-monde - chez le bien oublié Plantade - anticipant les microintervalles. Chemin de traverse l'après-midi dans la plus austère église de la Cöte-Saint-André, avec le déjà médiatique Edgar Moreau (violoncelle) et le pas encore connu Pierre-Yves Hodique (piano) pacourant avec un égal panache les "Routes de l'Allemagne romantique" (Mendelssohn, Schumann, Brahms).
François Lafon
Festival Berlioz, La Côte-Saint-André, jusqu'au 30 août. Photo © DR