Vendredi 19 avril 2024
Un récital royal pour Philippe II
La musique mystérieuse et captivante de Cabezón
Le clavier de l'âme

Aveugle, comme son compatriote Joaquín Rodrigo, Antonio de Cabezón (1510-1566) n'a pas eu la chance d'écrire un tube comme le Concierto de Aranjuez. Mais il a fait en revanche un carton à la cour de Philippe II, ce mélancolique collectionneur de livres sur le nécromancie qui a dû apprécier sans doute le caractère un peu ésotérique de la musique de son protégé. Cabezón était un virtuose (au clavecin et à l'orgue personne ne pouvait rivaliser avec lui dans l'Espagne du XVIè siècle) mais ses oeuvres n'essayent nullement d'en mettre plein les oreilles. D'une austère poésie, ces longues méditations sont parfaites pour accompagner les rêveries chevaleresques de Don Quichotte ou les extases de Sainte Thérèse d'Avila. Cabezon est ainsi à l'origine d'une tradition bien ibérique, perpétuée jusqu'à la fin du XVIIIè siècle, de musique pour clavier. Il maîtrise la polyphonie complexe mais, comme un peu plus tard Tomás Luis de Victoria, en lui insufflant souvent une dimension très expressive. Pour apprécier cet art, il faut donner un peu de temps à ces oeuvres, les laisser distiller peu à peu leur mystère. Paola Erdas l'a bien compris, qui joue ces pièces comme des petites confessions personnelles, sans chercher l'effet facile. Elle a surtout la bonne idée d'inclure certaines mélodies (chants grégoriens ou chansons à la mode du XVIè siècle) qui ont servi de modèle à Cabezon pour ses « diferencias » (variations sur un thème) et ses « tientos » (développements polyphoniques sur un thème).
Pablo Galonce

Oeuvres pour clavecin
Paola Erdas (clavecin)
1 CD Arcana A357
1 h 02 min

mis en ligne le mardi 3 août 2010

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