Vendredi 26 avril 2024
Le contre-ténor et son double
Bejun Mehta et René Jacobs cravachent Haendel
Ombra Cara

Dans l’opéra italien du XVIIIème siècle, le chiaroscuro n’était pas fait que de clair et d’obscur. Toutes les nuances de gris, tous les raffinements vocaux étaient convoqués pour mieux préparer l’auditeur à l’état second dont la voix des castrats était le vecteur. C’est ce que nous explique la pochette de ce récital Handel cosigné par le contre-ténor Bejun Mehta (petit cousin de Zubin) et le chef (et ex-contre-ténor) René Jacobs. On sent que celui-ci se retrouve dans la personnalité de celui-là. En scène, Bejun Mehta est phénoménal de présence, de virtuosité, de rapidité dans le passage d’un affect à un autre (le DVD bonus en donne une idée). Ici, en studio, il est cravaché par un orchestre hyper-expressif, qui l’oblige à se surpasser. Son air d’entrée, un exercice de haute école tiré d’Amadis de Gaule, met d’emblée la barre très haut. Mais Jacobs ne lâche pas pour autant son poulain dans les airs méditatifs, comme Stille amare, extrait de Tolomeo. Le seul hic – de taille pour un répertoire destiné à la voix, certes oubliée, de castrat – est que le timbre de Bejun Mehta n’est pas très phonogénique : manque d’égalité, de corps, de rondeur. Mais le surcroit d’adrénaline est là, et c’est au fond l’essentiel.
François Lafon

Airs extraits de Amadigi di Gaula - Agrippina - Riccardo Primo - Tolomeo - Orlando - Radamisto - Rodelinda - Sosarme
Bejun Mehta (contre-ténor) - Rosemary Joshua (soprano)
Freiburger Barockorchester
Direction musicale : René Jacobs
Harmonia Mundi HMC 902 077
1 h 12 min

mis en ligne le mercredi 5 janvier 2011

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