Opéra de Paris (direction : Rolf Liebermann), années 1970 :
-Qui dirige Les Noces de Figaro ce soir et Le Trouvère demain ?
-Charles Mackerras.
-Comme d’habitude.
English National Opera (Londres), même époque :
-Qui dirige Jules César avec Janet Baker ce soir ?
-Sir Charles Mackerras.
-Ah, très bien.
Rudolfinium (Prague), années 1980 :
-Qui dirige la 8ème de Dvorak avec le Philharmonique ce soir ?
-Charles Mackerras.
-La tradition.
N’importe où dans le monde (musical), 1983 :
-Jenufa vient de paraître chez Decca
-Par Mackerras, avec Elisabeth Söderström ?
-Oui. Je l’ai déjà acheté.
Londres, 14 juillet 2010 :
-Sir Charles est mort
-Mais il était jeune.
-Il était né en 1925, comme Pierre Boulez.
Trois axes : Mozart et Handel, la musique tchèque, et puis un énorme répertoire, tant symphonique que lyrique. Américain de naissance, Australien de formation, pur produit de l’establishment musical anglais d’après-guerre, mais aussi élève à Prague du grand chef Vaclav Talich, Charles Mackerras n’a pas été un chef au charisme ravageur, mais sans lui, les baroqueux auraient mis plus de temps à découvrir Handel, les mozartiens à déromantiser Mozart, les programmateurs à comprendre que Janacek fait partie du top ten des génies du lyrique (et de la musique tout court). Il laisse beaucoup de disques. Le Messie de Handel (Archiv), tous ses Janacek (Decca, Supraphon), sans oublier la série de Concertos pour piano de Mozart avec Alfred Brendel (Philips) sont à mettre entre toutes les oreilles. Les fans n’oublieront ni son Jules César (in english, avec Janet Baker – EMI), ni son récent Cosi fan tutte (Chandos), in english aussi, mais dirigé avec un chic sans égal.
François Lafon