Retransmission de Lohengrin à Bayreuth hier soir sur Arte. Premier direct télévisé de l’histoire du festival. Le spectacle mis en scène par le vétéran Hans Neuenfels a fait ses preuves l’année dernière. On a glosé sur ce roi à la couronne de carton, régnant, dans un univers blanc (asile psychiatrique, abri antiatomique ?), sur un peuple de rats. Un monde ultra germanique, entre Hoffmann et science fiction. Musicalement, une réussite aussi, avec le formidable Andris Nelsons (32 ans) au pupitre et une distribution parmi les plus équilibrées de l’histoire récente du festival. Bonne réalisation aussi : caméras plongeant à pic sur le plateau, habillage des rats pendant le prélude du 2ème acte, montage du décor en accéléré pendant celui du 3ème, interviews « à contenu » pendant les entractes. Peu après l’entrée de Lohengrin au premier acte : écran noir, grand silence. Au bout de deux minutes, auto-promo du programme culturel d’Arte, suivi d’un morceau de récital du ténor Jonas Kaufmann : La Flûte enchantée, Fidelio. Retour à Bayreuth au bout d’un quart d’heure : un orage avait coupé la ligne. L’année dernière, c’était Kaufmann qui chantait Lohengrin : voix sombre, nuances infinies, jeu subtilement décalé. Cette année, c’est Klaus Florian Vogt, la découverte du moment : voix claire, sincérité communicative, victoire à l’arraché. L’antithèse de la star Kaufmann, partie conquérir d’autres lauriers. Le temps est bien révolu où, à Bayreuth, les stars étaient en troupe.
François Lafon