Création annuelle de la Compagnie Les Brigands au Théâtre de l’Athénée : La Grande-Duchesse d’Offenbach. Celle de Gerolstein bien-sûr, qui a perdu son patronyme, ainsi qu’une partie de sa musique. Un Offenbach qui n’a rien de philologique (voir les travaux du musicologue Jean-Christophe Keck), mais pas non plus complaisant façon feu Jérôme Savary. C’est - mis en scène par le cinéaste Philippe Béziat - un festival de faux-semblants, de balles coupées, de dérapages contrôlés, d’allusions détournées à l’actualité : le beau militaire est gay, le baron Grog est une femme, le Général Boum mène la danse à coups de trompette. Tout le monde, chanteurs et musiciens (ces derniers sur scène, sans cesse en mouvement, dirigés par Christophe Grapperon), jongle, pour mieux les mettre à mal, avec les codes du théâtre, de l’opérette, de l’opéra. Ils pourraient aller plus loin, jusqu’au burlesque pur, mais la charge est déjà assez violente, assez offenbachienne en somme. Même inconfort pour les oreilles : couacs et finesse, musique de chambre et bastringue, chant châtié et parodie jusque chez Isabelle Druet, Grande-Duchesse à l’abattage pourtant idéal. Salle « de Fêtes », comble et ravie, mais un peu interloquée : pas innocent du tout, ce réjouissant jeu de massacre.
François Lafon
Théâtre de l’Athénée, Paris, jusqu’au 5 janvier. En tournée jusqu’au 21 janvier Photo © DR