Le chef d’orchestre Simon Rattle a déclaré une fois que le compositeur avec qui il aimerait diner et passer une soirée était Joseph Haydn, pour son esprit et sa curiosité de tout. Pour entendre en sa compagnie sa symphonie n°64 ? Relativement peu connue, cette symphonie en la majeur de la seconde moitié de 1773 est une des plus fascinantes du musicien d’Eszterhaza. A la plus extrême concentration, elle allie la souplesse et la séduction mélodique, ce à quoi vient s’ajouter, dans ses deuxième et quatrième mouvements, une grande complexité formelle. L’étrange et sublime Largo, d’une sensibilité à fleur de peau, a tout d’une fantaisie, et le finale présente en moins de trois minutes les multiples facettes d’une idée unique. Rattle et l’Orchestra of the Age of Enlightenment ont commencé avec cette 64ème leur concert dans le cadre du Festival Mozart du Théâtre des Champs-Elysées. Peu d’œuvres aussi discrètes d’apparence sont à ce point aptes à mener sans préparation un auditoire vers les sommets du « style classique ». Il faut dire que du Largo, Rattle a tiré le maximum. Le concert s’est poursuivi, toujours en beauté, avec le concerto pour deux pianos (joué au pianoforte par les Katia et Marielle Labèque) et la symphonie n°33 de Mozart, pour se terminer avec la 95ème de Haydn. Il est sûr que sans le souvenir obsédant de la 64ème, l’impression d’ensemble n’aurait pas été la même.
Marc Vignal
Théâtre des Champs-Elysées Samedi 18 juin, 20h (Photo DR)