Au théâtre de l’Athénée, Le Viol de Lucrèce de Benjamin Britten, mis en scène par Stephen Taylor (reprise de 2007, même lieu) et dirigé par Maxime Pascal à la tête de son ensemble Le Balcon. Le premier opéra de chambre (huit chanteurs, treize instrumentistes) de Britten, et déjà une maîtrise parfaite de l’exhibition/camouflage de ses obsessions, d’après une pièce française d’André Obey : innocence bafouée avec le viol par le roi Tarquin de la Romaine inflexible, autopunition avec le suicide de ladite Romaine peut-être pas si inflexible, le tout décrypté à la lumière du christianisme à venir par un Chœur male and female. Déjà un chef-d’œuvre de dramaturgie musicale : chaleur, cavalcades, grillons au lointain, plages lyriques et accès de violence, apparition tardive de l’objet du désir, catastrophe sur un chant sensuel et éthéré à la fois. Peu d’action, des présences : octuor de voix superbes de l’Atelier Lyrique de l’Opéra de Paris (deux distributions en alternance), mise en scène allant à l’essentiel. On pense à Claude Régy, mais aussi à Pierre Strosser, grand artiste méconnu (son austère Tétralogie au Châtelet est désormais culte) dont Stephen Taylor a été le disciple. Même esprit dans la fosse, où Maxime Pascal relit Britten comme il a relu Strauss (Ariane à Naxos - voir ici), avec un sens très fin de la rigueur et de la transgression.
François Lafon
Théâtre de l'Athénée, Paris, jusqu’au 19 janvier Photo © Cosimo Mirco Magliocca