Entrée du Roi Arthus d’Ernest Chausson au répertoire de l’Opéra de Paris, cent-onze ans après sa création à la Monnaie de Bruxelles. Un Tristan et Isole à la française auquel André Messager avait à l’époque trouvé « bien des inégalités », lui fermant ainsi les portes des théâtres parisiens. Non seulement on y tristanise, mais on y tétralogise, sans oublier d’y berlioziser, et même d’y debussyser. « On perçoit dans Le Roi Arthus un bouquet d’influences (…) … mais aussi enfin… beaucoup d’Ernest Chausson », se rattrape Philippe Jordan, lequel parvient, à la tête d’un Orchestre de l’Opéra en grande forme, à conférer à l’ouvrage de la grandeur, et même de la cohérence. Sur scène, un brelan d’as - Thomas Hampson (Arthus), Sophie Koch (Genièvre), Roberto Alagna (Lancelot) – entouré d’un cast sans faiblesse (mention aux ténors Stanislas de Barbeyrac et Cyrille Dubois, deux anciens qui font leur chemin de l’Atelier Lyrique maison). Mais aussi une mise en scène signée Graham Vick, dont le King Arthur (de Purcell) entre enluminures et Monty Python a laissé un grand souvenir (Châtelet – 1995). Cette fois, plus de chevaliers ni de Table ronde, mais un univers bucolique avec verdure-plastique, canapé-sky et maison en kit évoquant Les Sims (jeu vidéo personnalisable), ramenant la geste héroïco-sentimentale sublimée par Jordan et ses troupes à un vaudeville qui tourne mal entre le mari, la femme et l’amant. Un nouvel enterrement donc, un an après une version Grande Guerre, à l’Opéra du Rhin, qui avait déjà commencé de compromettre la deuxième vie de l’ouvrage.
François Lafon
Opéra National de Paris Bastille jusqu’au 14 juin. En direct le 2 juin sur Mezzo et Culture Box, le 6 juin sur France Musique. Photo © Andrea Messana/Opéra de Paris